Ce lundi 24 septembre, Michel Gbagbo, le fils de l’ancien président de la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo, vit son 532e jour de détention. Il est toujours détenu à Bouna, dans le Nord-Est du pays, soit presque deux ans d’enfermement loin de sa femme, de ses enfants et de sa mère. Entretien avec Me Habiba Toure, avocat de Michel Gbagbo, qui fustige une détention arbitraire. Selon elle, « aucun calendrier judiciaire n’a été fixé par la Justice ivoirienne, qui est malheureusement soumise au pouvoir politique ». Interview.
Afrik.com : Au bout de 532 jours de détention, qu’est-ce que la Justice ivoirienne reproche à Michel Gbagbo ?
Me Habiba Toure : Il est inculpé d’atteinte à la sûreté de l’Etat, de tribalisme, de xénophobie, enfin de choses aberrantes. Toutes nos demandes de mise en liberté provisoire ont essuyé des refus catégoriques. Ils estiment que la procédure est en cours. Pour les besoins de la procédure, il est préférable, selon eux, qu’ils le gardent entre leurs mains.
Afrik.com : Ces accusations sont-elles fondées ?
Me Habiba Toure : Non. Elles sont complètement délirantes. En août 2011, toutes les personnes détenues ont eu les mêmes chefs d’accusation. Or, il ne peut pas y avoir de poursuite collective. Parmi les chefs d’accusation, il est aussi inculpé d’usurpation d’identité. Quelle fonction aurait-il pu usurper ? Il est enseignant, c’est insensé!
Afrik.com : Dans quelles conditions est-il détenu ?
Me Habiba Toure : Nous craignons pour sa santé. Il est régulièrement piqué par des scorpions. Il dort à côté de reptiles. Pourquoi l’emmener jusqu’à Bouna alors que toute l’instruction est suivie à Abidjan ? Tout démontre que Michel Gbagbo est un otage politique.
Afrik.com : Quelles sont vos revendications ?
Me Habiba Toure : Nous n’avons rien à reprocher à la Justice ivoirienne qui est soumise au pouvoir politique. Avant même d’être inculpé, Michel Gbagbo a été illégalement détenu d’avril à août 2011. C’est seulement pour répondre aux critiques des organisations internationales, comme Amnesty International qui a dénoncé ces détentions arbitraires et menacé de considérer les détenus comme prisonniers de guerre, que la Justice ivoirienne s’est empressée d’inculper Michel. Nous demandons à la Justice d’en tirer les conséquences et de le remettre au moins en liberté provisoire. Car la Justice ne peut pas couvrir une détention illégale. Pour l’instant, notre demande est restée lettre morte. Il n’a jamais été un leader politique, on l’utilise comme une monnaie d’échange.
Afrik.com : Qu’est-ce qui vous fait dire qu’on va utiliser Michel Gbagbo comme monnaie d’échange ?
Me Habiba Toure : En Côte d’Ivoire, il y a un certain nombre de prisonniers détenus de manière illégale, leur rôle est celui d’être échangés. Ce n’est pas la Justice ivoirienne qu’on dénonce. Le juge d’instruction n’est pas vraiment indépendant. Sinon, il n’aurait d’autres choix que de remettre Michel en liberté.
Afrik.com : Selon vous, quelle est la solution pour le faire libérer ?
Me Habiba Toure : Notre position est claire. Au même titre que Michel, qui devra rendre compte des faits qu’on lui reproche, il doit aussi avoir un procès contre Guillaume Soro (ancien Premier ministre d’Alassane Ouattara et président de l’Assemblée nationale, ndlr) et les autres afin qu’ils expliquent pourquoi ils ont détenu Michel en dehors de tout cadre légal.
A l’occasion du 43e anniversaire de Michel Gbagbo, sa mère, ressortissante française, tout comme son fils, lui a envoyé un message vidéo.
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