La force française Licorne a effectué de nouveaux raids aériens contre la résidence présidentielle de Laurent Gbagbo, à Abidjan mercredi soir, en réponse à des « tirs nourris » contre l’ambassade de France, a justifié l’armée française. Plusieurs ambassades ont demandé assistance à la force Licorne. Le pays s’enfonce dans une crise humanitaire selon plusieurs ONG.
Sixième jour de siège autour du palais présidentiel. Le président sortant Laurent Gbagbo continue de résister aux offensives successives menées par les forces républicaines d’Alassane Ouattara. Des tirs sporadiques ont été entendus jeudi matin autour du batiment alors que les forces pro-Ouattara se préparent à un nouvel assaut d’envergure dans la journée. En déplacement à Nîmes mercredi, le ministre français de la Défense, Gérard Longuet, assurait que la France « n’interviendrait pas en Côte d’Ivoire pour déloger définitivement Laurent Gbagbo » du bunker où il s’est retranché, même si le président reconnu Alassane Ouattara faisait appel à elle. Et pourtant, il n’aura pas fallu longtemps au forces françaises de l’opération Licorne pour intervenir à nouveau contre le palais présidentiel où se terre Laurent Gbagbo et plusieurs de ses proches.
Mercredi soir, des hélicoptères d’attaque français ont mené de nouveaux raids aériens contre des positions de combattants pro-Gbagbo. L’ambassade de France à Abidjan a précisé que cette opération était une réponse à des « tirs nourris des forces pro-Gbagbo, situées dans et autour de la résidence présidentielle ». Les salves étaient « notamment dirigées » contre des bâtiments de l’ambassade française, contigus avec le palais présidentiel ivoiriens. Le communiqué évoque également « des intrusions » de combattants dans l’enceinte de l’édifice.
Exfiltration d’ambassadeurs
Sur demande de l’ONU et du Japon, la Force Licorne a également entrepris l’évacuation de l’ambassadeur du Japon en Côte d’Ivoire dans la nuit. Sa résidence du quartier chic de Cocody avait été attaquée dans le milieu de la nuit. L’ambassadeur a évoqué « une intrusion de mercenaires (…) tirant avec des (lance-roquettes) RPG ». Pendant l’attaque du bâtiment, il s’est enfermé dans sa chambre qui dispose d’une porte blindée, avec une douzaine de collaborateurs, avant de faire appel à l’ONU puis à la France. Ils ont été hélitreuillés «sains et saufs», précise l’ambassade française, et sont désormais en sécurité au camp militaire de Port-Bouët, base des forces françaises.
Des diplomates israéliens ont fait la même demande jeudi matin, selon le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé. « Nous faisons l’objet de nombreuses demandes », a déclaré le ministre devant les commissions de la Défense et des Affaires étrangères du Sénat. L’ambassade indienne à Abidjan qui craint également pour la sécurité de ses diplomates s’apprêterait à demander de l’aide à la force Licorne.
Une situation bloquée
La Côte d’Ivoire entre dans le 10ème jour de l’offensive menée par les forces pro-Ouattara sur l’ensemble du pays. Elles ont atteint Abidjan samedi dernier et prévoient pour aujourd’hui un nouvel assaut sur le palais présidentiel, dernière poche de résistance des pro-Gbagbo, pour déloger le président sortant quatre mois après le début du conflit post-électoral ivoirien. Les forces républicaines d’Alassane Ouattara montrent des signes de faiblesse et peinent à faire aboutir leurs offensives. Gérard Longuet a estimé que Laurent Gbagbo disposait encore « d’un petit millier d’hommes, dont 200 sont installées à sa résidence personnelle ». Selon le site internet de l’hebdomadaire Jeune Afrique, le président sortant serait protégé par des militaires d’élite angolais. Après s’être aligné sur la position de l’Union africaine le 24 mars dernier en demandant la formation d’un gouvernement d’union nationale présidé par Alassane Ouattara, l’Angola a effectivement changé de position hier, estimant que Laurent Gbagbo est le «président élu». La Russie a également critiqué ce matin les frappes menées par l’ONUCI et la force Licorne, les qualifiant « d’ingérence dans un conflit intérieur ».
La situation humanitaire s’aggrave également en Côte d’Ivoire. Les affrontements ont déjà poussé près d’un million d’Abidjanais à fuir en dehors de la ville. La paralysie de la plus grande ville du pays, font craindre aux ONG présentes sur place une crise alimentaire. Action contre la Faim et la Croix Rouge craignent une propagation incontrôlable de l’épidémie de choléra déjà en cours dans le quartier d’Adjamé à Abidjan. La sécurité alimentaire des habitants d’Abidjan est également menacée, selon les ONG, en raison du couvre-feu qui les empêche de se ravitailler et des coupures d’approvisionnements.
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