Côte d’Ivoire : la crise post-électorale préoccupe l’Uemoa


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La Côte d’Ivoire est la préoccupation majeure du sommet des chefs d’Etat de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) qui se déroule ce samedi à Bamako, au Mali. La conférence et Guillaume Soro, le Premier ministre d’Alassane Ouattara, le président reconnu par la Commission électorale indépendante, devraient revenir sur le rôle de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Beceao), notamment de son gouverneur Philippe Henri Dacoury-Tabley.

La 15e session ordinaire de la conférence des chefs d’Etat de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) aborde ce samedi « essentiellement » la question ivoirienne, selon Soumaïla Cissé, le président de la Commission de l’Uemoa. La Côte d’Ivoire est représentée par Guillaume Soro, le Premier ministre d’Alassane Ouattara, déclaré victorieux du second tour de la présidentielle ivoirienne le 28 novembre dernier. L’impact de la crise en Côte d’Ivoire, notamment sur la mise en œuvre des grands chantiers de l’Uemoa est à l’ordre du jour du sommet qui se tient au Mali, à qui revient la présidence en exercice de l’organisation. Le rôle prépondérant de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao), notamment dans la crise ivoirienne devrait être également examiné.

Depuis le 23 décembre dernier, le conseil des ministres de l’Uemoa a indiqué que la seule signature valable auprès de la banque centrale était celle du président « élu » Alassane Ouattara. « L’engagement de bloquer le fonds n’a pas été respecté. Il y a toujours des mouvements sur le compte de la Côte d’Ivoire dans les livres de la Bceao », déclarait récemment Albert Mabri Toikeusse, son ministre du Plan et du Développement. Ces décaissements jugés frauduleux, pour une somme estimée à plus de 80 milliards de F CFA, ont été effectués par l’administration de Laurent Gbagbo, le président sortant déclaré vainqueur de la présidentielle ivoirienne par le Conseil constitutionnel.

Le gouvernement d’Alassane Ouattara pourrait ainsi réclamer le départ de l’actuel gouverneur de l’institution financière, Philippe Henri Dacoury-Tabley, nommé par Laurent Gbagbo. Il remet en cause l’attentisme du gouverneur ivoirien face aux agissements du camp Gbagbo alors que des instructions précises lui avaient été données par le conseil des ministres de l’Uemoa. La situation du responsable de la Bceao est délicate car son nom devrait bientôt figurer sur la liste des sanctions de l’Union européenne où l’on retrouve des personnalités ivoiriennes proches de Laurent Gbagbo et accusées d’être impliquées dans la crise post-électorale.

L’effet Côte d’Ivoire

C’est la première fois depuis sa création en 1994 que l’Uemoa est confrontée à une telle situation : faire face à une crise politique et peut-être économique sans précédent dans le pays qui est la locomotive de l’Union. « C’est inédit », confirme Soumaïla Cissé.

En 2010, la Côte d’Ivoire a contribué à plus de 36% aux ressources propres de l’Union par le biais des reversements du Prélèvement communautaire de solidarité (PCS), devant le Sénégal (22,74%) et le Burkina Faso (10, 71%). Les activités de l’Uemoa et de ses institutions, la Bceao et de la Banque ouest-africaine de développement (Boad) devraient être affectées si la crise perdure en Côte d’Ivoire. Sur la Boad, affirmait ce vendredi son président Abdoulaye Bio Tchané, l’impact de la crise ivoirienne ne devrait « pas excéder 10 milliards » de F CFA sur l’année 2011. Une somme qui représente « beaucoup » pour la banque dont les Etats membres ont évité d’accumuler des arriérés de paiement vis-à-vis d’elle. « Nous devons nous adapter (à la situation). Ce n’est pas la même chose que ce qui se passe au niveau de la banque centrale (…) où on a besoin de prendre des décisions administratives ». Ces dernières concernent notamment les bons et les obligations émis par le gouvernement ivoirien sur le marché. Elles auront un impact sur la Boad mais encore plus sur les banques de la sous-région et sur certains opérateurs économiques. « Sur l’année, les échéances font plus de 600 milliards de F CFA, mais on a des solutions » pour éviter l’effondrement du système, précise Abdoulaye Bio Tchané.

En attendant, les premiers effets de la crise politique en Côte d’Ivoire se font déjà ressentir aussi bien dans le pays que dans la sous-région, notamment en matière d’inflation. En cause la raréfaction des produits sur le marché, la perturbation des circuits d’importation et le renchérissement des assurances. De même, la situation pèse aussi sur les transferts d’argent effectués par les travailleurs immigrés en Côte d’Ivoire. Par ailleurs, le retour éventuel de ces personnes, si leurs intérêts étaient menacés, aurait un impact social dévastateur dans les pays d’origine qui sont souvent ceux de l’Uemoa.

L’option militaire évoquée par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) est toujours une option pour déloger Laurent Gbagbo. Réunis à Bamako jusqu’au 20 janvier dernier, les chefs d’Etat major de la Cedeao ont indiqué qu’ils étaient prêts à intervenir mais attendaient la décision des politiques, entre autres celles du sommet de l’Uemoa. La question ivoirienne était déjà à l’ordre du jour de la conférence des chefs d’Etat l’année dernière. L’agenda de l’Uemoa est accaparé ces deux dernières années par des questions politiques alors que ses grands projets, notamment dans le domaine de l’énergie, sont en passe d’être concrétisés.

La conférence des chefs de l’Etat devra aussi se prononcer sur la succession de Soumaïla Cissé, dont le second et dernier mandat arrive à échéance fin février prochain. Le Sénégal, le Niger et la Guinée-Bissau semblent intéressés par le poste. Le sommet doit également examiner le cas Abdoulaye Bio Tchané qui brigue la présidence béninoise en février prochain et qui, par conséquent, ne terminera pas son mandat de six ans à la tête de la Boad.

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