A la demande de la population ivoirienne, « fatiguée d’essuyer des humiliations sur les routes et épuisée d’assister à des séances incontrôlées de racket des forces de l’ordre », le chef d’état-major, le Général Philippe Mangou a décidé d’entreprendre cette semaine une lutte acharnée contre le racket et les tracasseries routières.
Notre correspondante à Abidjan
C’était chose banale et même normale en Côte d’Ivoire que de donner de l’argent à des policiers ou autres « corps habillés » à chaque barrage. Mais depuis le lundi, les bourses des racketteurs ont pris un coup. Plus de pièces de 500 francs ni de billets de 1000 francs CFA ne résonneront dans leur poche. Ils devront se contenter de leur prime de fin de mois et, pour certains, des 900.000 francs CFA de « haut les cœur » qui leur reviennent de droit pour avoir combattu pendant la guerre.
Les barrages pléthoriques sur toutes les artères du pays sont passés à cinq. Daloa, Issia, Bondoukou, Daoukro, Duékoué. Et il sera exigé dorénavant sur les routes intermédiaires, un contrôle des agents eux-même à partir de leur matricule. C’est la décision de leur supérieur hiérarchique, le général Philippe Mangou décidé à redorer l’image de sa corporation. Il est accompagné dans cette tâche par le commissaire du gouvernement Ange Kessy.
Pour suivre et faire appliquer les mesures sur le terrain, le Général dit avoir besoin de 13 véhicules de type 4×4 et de 13 postes HF Mobile pour assurer la communication entre les différentes unités déployées à Abidjan et dans les cinq villes de l’intérieur du pays. Cette campagne évaluée à plus de 400 millions de francs CFA. Une somme qui n’a pas encore été mise à la disposition du général Mangou qui compte aller jusqu’au bout de cette lutte contre le cancer de l’économie ivoirienne.
Un syndicat des « corps habillés » a fait de la résistance
Le racket enrichit nombre de fonctionnaires au détriment des caisses de l’Etat. C’est en moyenne 2,3 millions de francs CFA que le chauffeur d’un mini-car de transport intercommunaux, appelé « gbaka » dans le jargon ivoirien, débourse par an lors des contrôles de routine. Quand on sait que ces mini-car sont 10 000 environ dans la seule ville d’Abidjan, le résultat est énorme. Des sources avaient déjà avancées que la somme globale de ces prélèvements illégaux s’élevait à 18 milliards de francs CFA par an.
Au sein de la grande muette, on n’était pas d’avis de respecter l’exigence de probité commandée en haut lieu. Dans un mot d’ordre de déstabilisation, le maréchal des logis (MDL) Akai Mambo, se proclamant responsable d’un syndicat au sein de l’armée, entendait faire échouer le plan de lutte contre le racket du Général Mangou. Le MDL, dans un document ayant des airs de tract, a appelé les forces de défenses et de sécurité (FDS) à s’opposer au combat du Général Mangou et demandé la démission de ce dernier et d’Ange Kessy.
Mais sans perdre de temps, le tribunal militaire ivoirien a sanctionné le MDL Akai Mambo. Il a été radié vendredi des effectifs des Forces de défense et de sécurité (FDS) de Côte d’Ivoire. A cette radiation s’ajoutent la suspension de sa solde et un mandat d’arrêt lancé contre lui par le procureur militaire Bernard Ange Kessi.
Une lutte qui n’arrange pas toujours la population
La nouvelle loi, qui ressort d’un séminaire tenu à Bassam en 2005, ne visait pas seulement à « sevrer » les FDS. Elle répondait aussi au besoin de voir certains transporteurs officiels circuler librement.
Mais malheureusement, ces derniers cohabitent avec beaucoup de transporteurs sans-papiers. La nouvelle mesure a cloué leur engin au sol. Depuis lundi, le calvaire de la population s’est accentué. Dans les sous quartiers d’Adjouffou, d’Abobo et yopougon où ces transporteurs ont leur plus grande clientèle. Les véhicules de transport intercommunaux, appelés « wôrô-wôrô » ont garé leurs véhicules faute de pièces. Se déplacer est devenu impossible.