Comme promis, Laurent Gbagbo a fait part aux Ivoiriens de sa stratégie de sortie de crise, un mois après le vote d’une résolution de l’ONU censée l’avoir fait. Dans un discours télévisé mardi soir, le président ivoirien constate l’« échec des solutions extérieures » et propose une discussion directe aux rebelles, de même que la suppression de la zone de confiance défendue par les troupes onusiennes et françaises.
« Gbagbo dribble partenaires et adversaires (…) Le Garrincha de la politique ivoirienne a encore fait montre de son art », titre le quotidien ivoirien d’opposition Le Patriote, au lendemain du discours télévisé du chef de l’Etat ivoirien. Le 2 novembre dernier, Laurent Gbagbo avait annoncé son intention de présenter aux Ivoiriens de « nouvelles règles de sortie de crise »… un jour après que le Conseil de sécurité de l’ONU l’a fait en adoptant une résolution sur son pays. Il laissait alors entendre qu’il ne tiendrait pas compte du texte onusien. Mardi soir, à la Radio-télévision nationale (RTI), après un mois de consultations, Laurent Gbagbo a insisté sur cette voie.
Devant « l’impasse des solutions extérieures », il a répété qu’il revenait désormais aux Ivoiriens de trouver une solution à la guerre déclenchée le 19 septembre 2002 par le Mouvement patriotique de Côte d’Ivoire (MPCI), devenu les Forces Nouvelles. Aucun des « sommets de Chefs d’Etat, résolutions et accords » signés depuis cette date n’a « pu ramener la paix » à ce jour, a-t-il plaidé. Un blocage dont il a une nouvelle fois rendu les Forces Nouvelles responsables. Si elles ont expliqué « pourquoi elles ont pris les armes », elles ne disent pas pourquoi elles ne les ont « pas encore déposées » alors que la Côte d’Ivoire « a satisfait à toutes leurs demandes », assure-t-il.
La première de ses cinq propositions de sortie de crises n’en consiste pas moins dans « l’instauration d’un dialogue direct avec la rébellion en vue du désarmement et de la réunification du pays ». Le président ivoirien souhaite que de telles discussions puissent s’achever dès janvier 2007, afin que le désarmement, puis les élections, puissent avoir lieu en juillet 2007. De telles discussions devaient se dérouler mardi après-midi, à Abidjan, dans le cadre du groupe de travail sur le désarmement. Mais sa réunion, la première, a été annulée après que la garde républicaine a interdit l’accès à la primature aux représentants de la rébellion.
« Suppression de la zone de confiance »
Les plus fervents partisans de Laurent Gbagbo lui demandaient de mettre dehors les troupes de l’ONU et l’opération française Licorne, notamment déployés dans la zone de confiance qui partage de fait le pays en deux. Sans aller aussi loin, le chef de l’Etat propose « la suppression de la zone de confiance ». « Elle n’a plus sa raison d’être, a-t-il expliqué. Les affrontements militaires ont cessé [et] de part et d’autre, la volonté d’une reprise des hostilités n’existe plus. »
Par ailleurs, estime-t-il, elle « pose plus de problèmes qu’elle n’apporte de solutions » [et] « constitue un obstacle physique à la réunification du pays. » Le chef de l’Etat ne dit pas ce qui adviendrait des 7 000 casques bleus et 3 500 militaires français déployés sur cette bande. Ni quelle autorité « a compétence pour supprimer la zone de confiance », souligne Le Nouveau Réveil.
Le président ivoirien a également proposé une nouvelle loi d’amnistie, pour compléter celle votée en 2003, afin que « toutes les personnes impliquées » dans la crise depuis cette date puissent aussi en bénéficier. Comme la dernière, elle « ne couvrira pas les crimes contre l’humanité et les crimes économiques ». Ses deux dernières propositions consistent dans « la création d’un service civique national » de 18 mois, censé former les « jeunes qui, faute de formation et d’emploi, sont exposés à toutes les tentations », et dans « la mise en place d’un programme d’aide aux déplacés de guerre ».
En image : photo d’archive.