Comme un air de déjà-entendu. Laurent Gbagbo a de nouveau appelé vendredi à « un dialogue inter-ivoirien » alors que la communauté internationale fait monter la pression sur son gouvernement. La violence est une « voie sans issue », affirme vendredi son porte-parole Ahoua Don Mello. Une réponse implicite aux dirigeants ouest-africains et à la France qui demandent un renforcement de l’opération des nations unies en Côte d’Ivoire (onuci).
L’arrêt immédiat des violences en Côte d’Ivoire et la reconnaissance par Laurent Gbagbo de la victoire d’Alassane Ouattara à l’élection de novembre dernier. Le projet de résolution déposé ce vendredi par la France et le Nigeria aux membres du Conseil de sécurité de l’ONU est sans détour. Il réclame le départ de Laurent Gbagbo, lequel serait visé avec son entourage par des sanctions aggravées, selon l’ambassadeur de France auprès des Nations unies, Gérard Araud. Le projet de résolution, qui devrait être discuté la semaine prochaine, demande aussi à la Cour pénale internationale (CPI) et au Haut commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme de présenter un rapport au Conseil de sécurité sur les accusations d’exactions commises contre des civils.
Appels du pied de Gbagbo
Une fermeté qui tranche avec les tentatives de conciliation du camp Gbagbo. Ce même vendredi, le porte-parole du président sortant, Ahoua Don Mello, a de nouveau appelé au « dialogue inter-ivoirien », en affirmant que la force est « une voie sans issue ».
Laurent Gbagbo tenterait, selon Jeune Afrique d’approcher les chancelleries occidentales à Abidjan pour défendre l’idée d’un gouvernement d’Union nationale dont il serait à la tête et où Alassane Ouattara le seconderait.
Ainsi, selon des sources diplomatiques, Laurent Gbagbo aurait chargé quelques ministres dont son porte-parole d’intervenir auprès des conseillers et secrétaires des ambassades de France, d’Italie, d’Espagne et des États-Unis. Mais Alassane Ouattara et les chancelleries occidentales seraient restés sourds aux appels du pied de Laurent Gbagbo. Ce dernier avait déjà tendu une première fois la main à son rival Alassane Ouattara, le 19 mars. Une offre que le président reconnu par la communauté internationale avait déclinée. Quelques jours auparavant, l’Union africaine (UA) avait émis une proposition de sortie de crise qui permettait à Alassane Ouattara d’occuper effectivement le poste de chef d’Etat ivoirien, tout en incluant dans le nouveau gouvernement formé des partisans de Laurent Gbagbo. Des propositions que le camp Gbagbo avait rejetées en bloc.
L’ONU clouée au pilori
Le Conseil des droits de l’homme de l’Onu a annoncé vendredi la création d’une commission d’enquête internationale et indépendante pour juger des allégations de violations et crimes commises sur les populations civiles. Le Conseil, qui a reconnu Alassane Ouattara comme le président légitime de la Côte d’Ivoire, affirme sans détour que « la crise en Côte d’Ivoire est le résultat de l’incapacité de M. Gbagbo à accepter les résultats » des élections présidentielles de novembre. Il affirme également que « les forces de défense et de sécurité (FDS) loyales à Laurent Gbagbo ont fait un usage excessif et mortel de la force pour réprimer les opposants politiques ».
La communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a demandé jeudi au Conseil de Sécurité des Nations Unies « de renforcer le mandat de l’Onuci » pour « faciliter le transfert immédiat du pouvoir à M. Alassane Ouattara ».
Les partisans de Laurent Gbagbo exigent, quant à eux, le départ immédiat des 10 000 hommes de la force onusienne. Ils les qualifient « d’ennemis de la Côte d’Ivoire ». L’ONU « veut protéger les civils en envoyant des bombes sur eux, comme en Libye », a déclaré à l’AFP Ahoua Don Mello. « L’Onuci est partisane » et « on a besoin d’un arbitre impartial qui ne prenne pas position », a ajouté ce dernier. Le gouvernement ivoirien remet en cause la neutralité des casques bleus en Côte d’Ivoire, qu’il juge incapable de protéger la population civile.
Les combats qui opposent les partisans de Laurent Gbagbo à son rival Alassane Ouattara ont fait 462 morts depuis les résultats de la présidentielle de novembre dont 52 personnes durant la semaine écoulée. On compte 500 000 déplacés à l’intérieur du pays et 90 000 à l’extérieur.