Deux des avocats français de Laurent Gbagbo, Jacques Vergès et Marcel Ceccaldi, ont été refoulés ce vendredi de Côte d’ivoire, faute de visas en règle. Ils souhaitaient assister au premier interrogatoire du président déchu par la justice ivoirienne.
La bataille judiciaire est engagée. Mais sans avocats, pour le président ivoirien sortant. Deux des cinq avocats de Laurent Gbagbo, Jacques Vergès et Marcel Ceccaldi, se sont vus interdire l’entrée à l’aéroport d’Abdijan, faute de visas en règle. Ils ont été reconduits au terminal d’embarquement, où ils devaient reprendre l’avion pour Paris. Ils souhaitaient assister à la première audition de leur client par le nouveau procureur de la République, Simplice Kouadio Koffi, à Korhogo dans le nord du pays, où il a été placé en détention après son arrestation le 11 avril par les forces du président Alassane Ouattara, appuyées par celles de l’Onuci et la force française Licorne.
« Manifestement, on ne veut pas que le président Gbagbo soit défendu. Je suis très pessimiste sur l’avenir d’un régime qui traite les avocats de cette manière », a estimé le célèbre avocat Jacques Vergès, dont le visa aurait été délivré par le consulat de Nancy. Mais les autorités ivoiriennes ont soutenu que le document n’avait pas été validé par l’ambassade de Côte d’Ivoire à Paris. « Les autorités se livrent à une palinodie de justice », a dénoncé Marcel Ceccaldi, qui ne disposait pas de visa mais avait écrit au Procureur pour lui demander de favoriser son entrée dans le pays. La troisième membre de l’équipe, l’avocate franco-camerounaise, Lucie Bourthoumieux, détentrice d’une carte de résident, a pu passer les contrôles mais a décidé de repartir avec ses collègues vers Paris.
Une procédure judiciaire qui pose question
Cet incident survient alors que le président ivoirien Alassane Ouattara doit être investi ce vendredi. Il a été proclamé jeudi officiellement chef d’Etat de la République de Côte d’ivoire par le président du Conseil Constitutionnel, Yao Ndré, qui avait lui-même le 3 décembre dernier, après les élections présidentielles du 28 novembre, proclamé Laurent Gbagbo président. Cette contestation des résultats entre pro-Gbagbo et pro-Ouattara avait conduit le pays dans la violence.
La procédure judiciaire lancée par le camp Ouattara contre Laurent Gbagbo pose question. La justice ivoirienne chargée du dossier est-elle compétente pour le traiter ? Pour le moment, la saisie de l’affaire par les instances internationales n’est pas à l’ordre du jour. La Cour Pénale internationale a mis toutefois en place un examen préliminaire sur des « massacres commis de façon systématique ou généralisée » dans le pays. Il est destiné à établir si les crimes commis relèvent de sa compétence. Sans compter que les défenseurs du président déchu remettent fortement en question l’indépendance de la justice maintenant qu’Alassane Ouattara est à la tête du pays. Leur interdiction de séjour en Côte d’ivoire par les autorités ne fera que conforter leurs doutes.