L’Union africaine a publié lundi la composition du panel de cinq chefs d’Etat qui doivent relancer la médiation en Côte d’Ivoire. Ceux-ci ont un mois, à partir du début de leur mission, pour régler le problème du bicéphalisme auquel a abouti l’élection du 28 novembre 2010 dans ce pays. Alors que le soutien unanime à Alassane Ouattara, l’un des deux présidents proclamés, n’est plus assuré au sein de l’UA, le président français, Nicolas Sarkozy, s’active pour faire pencher la balance en sa faveur.
L’Union africaine part sur de nouvelles bases en Côte d’Ivoire. Ce lundi à Addis Abeba, la capitale éthiopienne, la Commission de l’organisation panafricaine a rendu public la liste du panel de cinq chefs d’Etat, qui doivent relancer le dialogue pour une sortie de crise en Côte d’Ivoire. Il s’agit : de Mohamed Ould Abdel Aziz (Mauritanie), d’Idriss Deby (Tchad), Jacob Zuma (Afrique du Sud), Blaise Compaore (Burkina Faso) et Jakaya Kikwete (Tanzanie). Annoncé au départ comme devant en faire partie, le président zimbabwéen, Robert Mugabé n’a finalement pas été retenu, les critiques s’étant accumulées sur la situation politique dans son propre pays. La décision de constituer ce panel dans lequel chacune des cinq organisations sous-régionales africaines est représentée avait été prise vendredi, lors d’une réunion du Conseil de paix et de sécurité (CSP) de l’UA tenue à Addis Abeba, deux jours avant le sommet des chefs d’Etat de l’organisation, dimanche.
Le panel sera présidé par le Mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz. Ses membres se rendront en Côte d’Ivoire à une date non encore déterminée. Ils y seront accompagnés du président de la commission de l’UA, Jean Ping et du président de la commission de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest (Cédéao), James Victor Gbeho. Leur mandat a une durée limitée d’un mois. « Le président (du panel) rencontre ses collègues (ce lundi) pour discuter de leur programme car ils doivent agir et ils n’ont qu’un mois », a indiqué le porte-parole de la Commission, Nourredine Mezni.
Décisions contraignantes
Vendredi, l’Union africaine a annoncé que les décisions du panel seront « contraignantes » pour toutes les parties ivoiriennes. Samedi à Adis Abeba, Jean Ping a précisé que son travail consistera essentiellement à permettre à « Alassane Ouattara d’exercer la réalité du pouvoir » dans le pays « par la négociation ». Le même jour au siège de l’UA, une concertation tripartite a eu lieu, entre représentants de l’Union africaine (UA)[[Etaient présents : Les présidents du Nigeria Goodluck Jonathan, président en exercice de la Cédéao (Communauté des Etats d’Afrique de l’ouest), le sénégalais Abdoulaye Wade, le malien Amadou Toumani Touré, le béninois Boni Yayi, le Togolais Faure Gnassingbé, le burkinabé Blaise Compaoré, le mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, ainsi que le Premier ministre éthiopien Meles Zenawi]] , de l’ONU et présidents des pays d’Afrique de l’Ouest. Après cet huis-clos de trois heures, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a indiqué qu’il soutenait la création du « panel », et appelé « le président Ouattara à former un gouvernement d’union nationale ». Dans la feuille de route qu’il a établi pour l’Onu et le panel au sujet des négociations à venir, Ban Ki-moon a proposé « une sortie honorable pour M. Gbagbo » et « une action concrète pour lever le blocus du siège de l’hôtel du Golf » où s’est retranché Alassane Ouattara et certains de ses proches partisans à Abidjan. Le Panel devrait « travailler en étroite collaboration avec l’Onu dans tous les aspects et à toutes les étapes du processus », a souligné le secrétaire général des Nations unies.
Nicolas Sarkozy VRP d’Alassane Ouattara
Dans ce nouveau round de négociations qui sa s’ouvrir, Alassane Ouattara, l’un des présidents proclamés de Côte d’Ivoire, peut compter sur un allié particulièrement actif, le président français, Nicolas Sarkozy. Celui-ci a participé au sommet d’Addis Abeba dimanche, notamment pour plaider sa cause. Evoquant à l’occasion le dossier ivoirien avec Ban Ki-moon, il a salué la création du « panel » de cinq chefs d’Etat africains. Selon le journal français L’Express, pendant que le camp Ouattara multiplie les rencontres officieuses dans l’espoir de « voir l’UA rester dans la ligne de la communauté internationale et imposer des sanctions contre Laurent Gbagbo et son entourage », leur puissant allié français fait du lobbying auprès des chefs d’Etat. «Nicolas Sarkozy, ses ministres et ses conseillers se chargeront de rencontrer les présidents les plus favorables au président Gbagbo pour tenter de les faire changer d’avis, du moins de s’assurer de leur neutralité », a écrit L’Express, dimanche.
La division de l’Union africaine se confirme
La partie est cependant loin d’être facile pour Alassane Ouattara, qui a demandé dimanche à ses concitoyens d’arrêter de payer taxes et impôts, suite à la décision de la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) de fermer ses agences de Côte d’Ivoire. Comme le signalait précédemment Afrik.com, les chefs d’Etat membres de l’UA ne sont plus unanimes pour reconnaître sa victoire à l’élection présidentielle du 28 novembre, comme préalable à toute négociation. Commentant sa visite surprise de mardi en Côte d’Ivoire, le président sortant de l’organisation, le Malawite Bingu wa Mutharika indiquait qu’il présenterait les « propositions » de « son frère et ami » Laurent Gbagbo lors du sommet de dimanche. Son successeur à la tête de l’institution panafricaine, le président de Guinée Equatoriale, Teodoro Obiang Nguema, a laissé son entourage dire qu’il « n’était pour personne » dans la crise ivoirienne. Des voix qui viennent renforcer la division qui fait son chemin au sein de l’organisation, au sujet de la Côte d’Ivoire.
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