Les passions montent, au nord de la Côte d’Ivoire, autour des conditions d’exploitation de la mine d’or de Tongon, située à quelques dizaines de kilomètres au nord de Korhogo. En effet, les activités liées à l’exploitation de l’une des plus importantes mines du pays, concédée à la société canadienne Barrick Gold, ne profitent que très peu aux autochtones.
Un article de nos confrères de Koaci datant du 25 février 2024 fait état d’une mise à l’écart des sociétés ivoiriennes au détriment de sociétés étrangères, et tout particulièrement maliennes. Avec comme conséquences directes le fait que l’importante activité de la mine ne génère que peu de retombées en termes d’emplois et de revenus pour les entreprises ivoiriennes, qui se voient préférées des entreprises étrangères, qui ne contribuent pas au développement des localités alentour, comme le déplore le Comité mixte des villages riverains dans un communiqué dont Koaci cite de longs passages.
La situation est particulièrement mal tolérée localement pour la société SAMA, l’une des rares entreprises ivoiriennes présentes sur le site, employant largement une main d’œuvre locale, et dont l’activité profite directement aux autochtones. Celle-ci apparaît clairement capable d’assurer un volume d’activité plus important que celui qui lui est dévolu, au profit d’autres acteurs, en particulier maliens, recourant prioritairement à une main d’œuvre étrangère. Très logiquement, SAMA pourrait constituer le levier naturel d’une meilleure répartition de la richesse produite par l’activité de la mine, en développant une action de proximité en termes de responsabilité sociale et environnementale, volet que les entreprises étrangères, aujourd’hui privilégiées par Barrick Gold, ne mettent évidemment pas en avant.
Le moment est particulièrement bien choisi pour faire entendre ces revendications issues de la société civile, puisque plusieurs contrats de sous-traitants et prestataires arrivent à leur terme. Ainsi, la fin du contrat de la Tongonaise de Mines, la TOMI, est tout particulièrement scruté, le bruit courant que son activité serait désormais attribuée à une société malienne, ce qui, dans le contexte des tensions actuelles entre les deux pays et de la sortie du Mali de la CEDEAO, paraîtrait tout particulièrement peu opportun, voire contre-productif.
Une lutte de positionnement s’annonce entre les différents acteurs et nombreux sont les habitants des localités voisines qui souhaitent qu’une entreprise locale, comme SAMA, puisse élargir à cette occasion sa part de marché dans les activités de la mine de Tongon, pour le plus grand profit des populations du département de M’Bengué.
Au-delà des rivalités régionales ou internationales, c’est bien la gouvernance de grands groupes miniers souvent oublieux des réalités locales, qui est en question dans cette région du Nord de la Côte d’Ivoire : comment faire mieux profiter les autochtones des richesses extraites du sol légué par leurs ancêtres ? A l’évidence, la problématique des retombées locales en termes d’activités et de revenus ne peut plus être ignorée ou méconnue, comme elle a pu l’être dans le passé.