Un épisode important de la vie politique congolaise, parfois tumultueuse et parfois sereine à l’instar des eaux du fleuve Congo, s’est joué le 12 août 2015 au Palais des Congrès de Brazzaville. Sauf que ce n’était pas celui auquel la plupart s’attendaient…
9h00 du matin. Le temps est couvert et l’atmosphère humide. Certains disent électrique. La salle se remplit peu à peu. L’événement se veut populaire mais les dignitaires sont évidemment tous présents. Parlementaires, ministres, représentants des corps constitués, etc., tout ce que la capitale congolaise compte de personnalités influentes s’est donné rendez-vous pour écouter le « message sur l’état de la Nation », prononcé par le Président Denis Sassou N’guesso.
10h00. Dans l’attente des mots prononcés – « historiques » selon certains invités – la salle s’anime peu à peu. Les discussions, mais surtout les spéculations, vont bon train. Car une question est sur toutes les lèvres : l’annoncera-t-il ou pas ? Quoi donc ? Le referendum, naturellement. La question anime le débat politique au Congo depuis plusieurs mois.
11h00. Les esprits ne devraient pas tarder pas à être fixés. À peine les derniers officiels ont-ils le temps de prendre place dans les premiers rangs, écharpes ceintes en bandoulière, que le premier personnage de l’État, le Président Sassou N’guesso fait son entrée en majesté. Les applaudissements sont nourris. Le Chef de l’État congolais prend alors la parole. Il ne la rendra qu’au bout de 75 minutes.
75 minutes d’un « discours qui restera », selon une députée assise au premier rang, « dans les annales de l’Histoire de la jeune démocratie congolaise ». Il n’empêche au final, l’annonce tant attendue – celle de l’organisation d’un referendum ouvrant la voix à une évolution institutionnelle – n’aura pas lieu. En tout cas, pas cette fois.
Plus qu’historique, le discours aura plutôt, en réalité, été rafraîchissant pour… la mémoire ! Le Président congolais s’est en effet évertué, pendant cette heure et demie passée à la tribune, à dresser un bilan de ses deux derniers mandats, rappelant à l’auditoire l’état désastreux dans lequel se trouvait le pays en 1997 (année durant laquelle le Président Sassou N’guesso a été porté au pouvoir au terme d’une guerre fratricide) pour mieux mettre en valeur les évolutions enregistrées depuis tant sur le plan de la stabilité et de sécurité qu’en matière économique et sociale. De là à penser que pour construire l’avenir, il faut s’appuyer sur le passé, il n’y a qu’un pas.
À n’en pas douter, le bilan sera sans doute l’argument principal de Denis Sassou N’guesso à l’avenir. En moins de vingt ans, le chemin accompli a, il est vrai, été conséquent. Le PIB par habitant, inférieur à 1.000 dollars en 1999, a pratiquement atteint, dès 2013 selon le PNUD, les 5.000 dollars. Le taux de croissance, placé sous la barre des 1 % en 1999, est ressorti en moyenne à 5 % entre 2000 et 2014. Une performance qui a conduit les grandes agences internationales de notation à décerner au Congo la quatrième meilleure note sur le continent. Alors que le taux de chômage a fortement baissé (passant de 19,4 % de la population à 6,9 % dès 2011), l’espérance de vie, elle, a sensiblement augmenté (52 ans en 2000 contre 59 ans en 2013). Dans tous les domaines (transports, énergie, télécommunications…), les infrastructures ont métamorphosé le pays en l’espace de quelques années. Mais plus que tout, c’est la paix et la stabilité qui constituent les principaux acquis de ces deux dernières décennies aux yeux de la population congolaise. Sur ce plan, alors qu’une partie du continent et de la sous-région d’Afrique centrale fait face aux troubles et à l’insécurité, le Congo tire largement son épingle du jeu.
Quoi que l’avenir réserve aux Congolais, et notamment au premier d’entre eux, une chose est sûre : l’année prochaine, à la même date, le Président de la République qui se tiendra devant les membres du Congrès sera celui sorti victorieux de l’élection présidentielle de juillet 2016. Sera-ce un nouveau Président ou un Président nouvellement réélu ? Il appartiendra au peuple congolais de trancher et aux urnes de livrer leur verdict. Mais à en juger par les applaudissements longs et nourris qui ont ponctué et conclu le discours du Président congolais, celles et ceux présents au Palais des Congrès ce mercredi 12 août 2015 à Brazzaville semblent d’ores et déjà avoir fait leur choix…