Le Président congolais Denis Sassou N’Guesso ne souhaite pas que le pays s’enfonce dans une année d’immobilisme électoral, et préfère mettre en place au plus vite les nouvelles institutions héritées du Référendum d’octobre 2016. D’où un raccourcissement de son mandat actuel, dont le terme était fixé au mois de juillet 2016 et qui s’achèvera en fait dès le mois de mars!
Denis Sassou N’Guesso se sent lié par la volonté du peuple congolais de changer de Constitution, selon les termes mêmes adoptés pour la nouvelle Loi Fondamentale congolaise lors du Referendum du 25 octobre dernier. Les questions les plus largement partagées au Congo était donc, ces dernières semaines : quand les nouveaux organes seront-ils en place ? Quelles élections réclament-ils ? Qui sera le Premier ministre responsable devant le Parlement ? Quelle forme prendra la décentralisation annoncée ? Etc.
Un dessein institutionnel cohérent et prioritaire
Bref, à quel rythme et selon quel calendrier la gouvernance du pays allait-elle se modifier, et même se modifier radicalement ? La réponse vient de tomber : Denis Sassou N’Guesso a prouvé, ce matin, que son dessein constitutionnel était à la fois prioritaire et cohérent. Afin que l’ensemble des nouvelles structures de gouvernance se déploient, il fallait d’abord que la première d’entre elles, c’est-à-dire la magistrature suprême, entendue, ainsi qu’elle le sera désormais, comme au-dessus des partis, soit mise en place.
Denis Sassou N’Guesso a donc pris la décision que lui seul pouvait prendre : raccourcir la durée de son propre mandat actuel, pour convoquer des élections présidentielles anticipées dès la fin du printemps 2016, dans la deuxième quinzaine du mois de mars 2016 vraisemblablement, comme croit le savoir notre confrère Jeune Afrique.
un mandat raccourci pour une gouvernance renouvelée dès mars
Par la suite, la nomination d’un Premier ministre en charge de conduire la politique de la Nation pourra naturellement intervenir, qui composera autour de lui la nouvelle équipe ministérielle. On voyait les visages soulagés des membres actuels du gouvernement, qui ne savaient pas, ce matin, s’ils auraient encore leur portefeuille ce soir, et apprenaient en direct leur prolongation de 3 mois dans leurs fonctions actuelles.
Puis il s’agira de mettre en place la décentralisation réelle et les nouveaux organes de consultation des différentes composantes de la société, en particulier les élites traditionnelles, tandis que la mise en place de la parité s’imposera à chaque étape démocratique.
Trois analyses convergentes
La décision du Président congolais peut s’expliquer par plusieurs analyses. La première, c’est la cohérence de sa démarche. Si le peuple congolais l’a suivi sur l’adoption d’une Constitution plus équilibrée entre les différents pouvoirs, et plus démocratique et lisible dans sa gouvernance, il n’y a aucune raison de ne pas lui en accorder le bénéfice au plus tôt.
La seconde, qui ne manquera pas d’être soulevée, c’est que Denis Sassou N’Guesso ne laisse pas le temps, en réalité, à l’opposition de construire un front uni derrière une personnalité qui fédérerait l’ensemble de ses rivaux potentiels. Une opposition désunie, c’est une opposition qui n’offre pas d’alternative crédible. En accélérant le processus électoral, et pour d’excellentes raisons, le Président coupe l’herbe sous le pied à ses adversaires.
La troisième, qui n’est pas contradictoire avec les autres, c’est que le Président ne souhaite pas obérer le rythme des travaux d’équipement du pays, et le rythme des réformes engagées, du fait d’une campagne électorale larvée qui durerait tout un semestre, pendant lequel le Congo présenterait un caractère d’instabilité potentielle, de nature à décourager les investisseurs et les hommes d’affaires.
Aller vite, c’est permettre de dégager rapidement une visibilité institutionnelle sur les 5 prochaines années. De quoi rassurer tous ceux qui souhaitent participer activement au développement de l’activité et de l’économie congolaises. Le rythme de développement actuel, très soutenu malgré la baisse du cours du baril de pétrole, ne doit pas être coupé. S’il connaît une suspension, celle-ci ne doit pas excéder 3 mois.
Bref, toutes les analyses, à la fois institutionnelles, stratégiques, tactiques, économiques, militaient pour une accélération du calendrier électoral. Et c’est donc la décision logique et courageuse que le Président Denis Sassou N’Guesso a solennellement annoncée et expliquée ce matin.