Congo, hold-up ? Trois ans après, qu’en reste-t-il ?


Lecture 5 min.
L'ancien président congolais Joseph Kabila
L'ancien président congolais Joseph Kabila

Du 19 novembre au 8 décembre 2021, trois semaines durant, un consortium de médias a décidé de «massacrer» quotidiennement un chef d’État honoraire africain. Le même dont certaines de ses composantes avaient vraisemblablement pour vocation de le vouer aux gémonies (descendre en enfer) lorsqu’il était en fonction. Avec 19 médias et 5 ONG,  ce consortium était coordonné par le réseau «European Investigative Collaborations», acronyme ressemblant curieusement à l’EIC (Etat Indépendant du Congo) de sinistre mémoire. On pourrait supposer son management par des puissances et forces occultes n’ayant jamais voulu de l’indépendance effective de la RDC, leitmotiv permanent  de leur cible désignée 

Une Tribune de Barnabé Kikaya Bin Karubi

Pour «Public Eye», une de ces ONG, «C’est la plus grosse fuite de données du continent africain : l’enquête Congo Hold-up révèle comment BGFIBank a servi à détourner des centaines de millions d’argent public et à piller les ressources naturelles de la République démocratique du Congo, avec la complicité de réseaux d’affaires internationaux et de banques, notamment en Suisse. Public Eye a publié une série d’articles, fruit de six mois d’enquêtes et d’une alliance inédite entre médias et ONG d’investigation».

Trois ans plus tard (2021-2024), ce ne serait pas trop que de se demander ce qui en reste tant dans les cours et tribunaux que dans  la mémoire collective! Rien ou presque ! Pschitt aurait dit un ancien président français.. 

En effet, n’ayant rien trouvé de consistant à rattacher à Joseph Kabila Kabange pour étoffer son acte d’accusation, «EIC» s’est vraiment fourvoyée dans cette affaire. 

Trois ans après , toujours aucune preuve!

La preuve est qu’elle est toujours incapable de produire les preuves de l’implication réelle du chef d’État honoraire. Un comble pour une entreprise qui selon ces auteurs aurait compulsé 3.500.000 documents sur six mois entre investigations et rédaction. Soit une moyenne de 1.023 documents par média et par jour. Soit encore 85,25 documents en 12 heures de travail non-stop. Elle n’aura fonctionné que pour ce dernier, allant jusqu’à se servir d’un logiciel informatique qui est tout, sauf le summum de la perfection. 

Lors du déclenchement de la campagne médiatique le 19 novembre 2021, ils ont reconnu que «Pour la première fois, une fuite de données permet de plonger dans les entrailles d’une banque. Un logiciel spécifique a dû extraire des documents les informations sur les flux financiers…».

Ce qu’ils n’ont pas dit, c’est qu’un logiciel informatique ne peut être totalement fiable. Il peut faire d’ailleurs l’objet d’un piratage. Certains spécialistes dénombrent jusque-là sept possibilités d’y parvenir : phishing ou hameçonnage, rançongiciel, logiciels malveillants, clé USB piégée, faux sites internet, vol de mot de passe et faux réseaux wifi, dans une opération qui n’est autre que de la cybercriminalité.  

Dès lors que trois ans après, EIC – qui terminait chacun de ses reportages papier par l’indication « Si vous avez des informations à nous communiquer, vous pouvez nous contacter à l’adresse xxx » – n’ait pas nourri ses investigations avec des éléments concrets liant leurs trouvailles à la personne de Joseph Kabila, prouve amplement que la campagne a fait flop. 

Ce qui s’appelle une conjuration

D’ailleurs, les méthodes de travail de ce genre de conglomérat ont eu dernièrement un « hoquet » avec le désistement de Colette Braeckman, journaliste belge associée dans une aventure similaire. Elle s’est fait taper sur les doigts par sa hiérarchie pour avoir dénoncé les pratiques adoptées pour le montage du dossier. «J’ai été impliquée dans une opération qui n’a rien de journalistique, qui s’appelle une conjuration », a-t-elle déploré.

Ce qui laisse supposer qu’il s’agit des mêmes pratiques avec des tirs groupés, question de ne laisser à la personne à exécuter aucune possibilité d’échapper au «peloton d’exécution».   

On a voulu en finir avec Joseph Kabila après l’avoir raté successivement entre 2008 et 2011 pour cause du contrat sino-congolais, en 2016 avec Panama Papers, en 2018 aux élections financées pour la première fois sur fonds propres avec à la clé l’alternance historique du pays qui a porté au pouvoir, à leur grande surprise, un opposant, à savoir Félix Tshisekedi, en 2020 avec la liquidation sur commande de la coalition FCC-CACH et en 2021 avec «Congo Hold Up». Depuis, on est dans des théories complotistes !

Trois ans après, la vérité à admettre est que l’EIC voulait lui faire mal. Pour avoir manqué l’objectif, plusieurs tireurs d’élite camouflés dans cette cabale qui a tout ce qu’il y a de sale à savoir correspondants de presse, activistes des ONG ou dirigeants politiques, ont été soit  éloignés des médias et de leurs organisations ou récusés par leurs électorats. Karma, effet boomerang ou justice immanente? À chacun son constat. Pour sa part, le peuple congolais, consommateur principal désigné de cette basse manœuvre médiatique, n’a heureusement pas cédé à ces cris d’orfraie et sait désormais, grâce au rétroviseur historique, faire un comparatif juste entre le passé et le présent.

par Barnabé Kikaya Bin Karubi

Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News