Importées d’Asie, les motos tricycles envahissent les villes sénégalaises. Dans la capitale, Dakar, elles circulent à longueur de journée, approvisionnant les différents marchés et boutiques, de denrées de première nécessité, de légumes et d’autres produits. Mais, ce métier est encore loin d’être rentable, selon les conducteurs qui disent rencontrer d’énormes difficultés pour joindre les deux bouts. Sans assurance maladie, certains conducteurs peuvent se retrouver handicapés, pour le restant de leur vie, après un accident de travail, faute de moyens pour se soigner correctement.
Les motos tricycles arpentent de plus en plus les rues de Dakar, transportant plusieurs sortes de marchandises : légumes, fruits, friperie et même des matériaux de construction. Si ces moyens de transport sont aujourd’hui essentielles dans l’économie nationale, les conducteurs de tricycle rencontrent d’énormes difficultés. Au marché Castors de Dakar, ils sont une centaine de jeunes âgés de 18 à 35 ans à exercer le métier et sont toujours sur le qui-vive, guettant d’éventuels clients. Ils sont généralement Guinéens d’origine, mais certains jeunes sénégalais ont également intégré le secteur, dans le but de gagner honnêtement leur vie.
Né au Sénégal, mais d’origine guinéenne, Ousmane Diallo, le regard lointain, sans doute lié à la fatigue accumulée durant la journée, estime que leur travail est très contraignant, puisqu’ils ne gagnent pas assez d’argent, faute de clients parfois. Il évoque aussi le calvaire vécu dans la circulation avec notamment les tracasseries policières. « On a opté pour ce travail, mais c’est difficile de nous en sortir. Parfois, nous ne trouvons pas assez de clients. Comme vous voyez, on peut s’asseoir des fois ainsi toute la journée, sans rien trouver comme travail à faire. On peut se retrouver avec deux à trois courses la journée, si tout se passe bien. Pour chaque course, on peut gagner entre 3 000 et 6 000 FCFA. Mais, imagine par exemple que tu gagnes 8 000 FCFA dans la journée, que tu doives verser 4 000 FCFA au propriétaire du tricycle, sachant que la police de la circulation te prend 2 000 FCFA et que tu achètes 2 000 FCFA de carburant, au finish, tu te retrouves sans aucun sou », se plaint-il.
Malgré les difficultés rencontrées, Ousmane Diallo pense qu’avec un peu plus d’organisation, ce métier pourrait être rentable pour tous, si les autorités essayaient un peu de le considérer comme une vraie profession, qui contribue à lutter contre le chômage et la précarité. « Nous avons besoin que les autoroutes nous viennent en aide, pour voir comment professionnaliser un peu le secteur et le formaliser. Notre métier, c’est conducteur de tricycle et je pense que nous contribuons à la croissance de l’économie nationale, puisque nous sommes comme un trait d’union entre les différents marchés de la capitale sénégalaise. Nous aidons également les gens qui déménagent… Nous travaillons dur, mais nous ne gagnons presque rien », se lamente-t-il, sous les ovations de ses autres collègues qui l’écoutaient sagement énumérer leurs difficultés quotidiennes.
Mamadou Oury Diallo, trouvé sur place, raconte qu’il a eu un accident de tricycle, il y a quelques années et depuis il marche appuyé sur une béquille. Ne travaillant plus, il vient juste souvent au marché pour demander de l’aide, afin de pouvoir survivre. « J’ai eu un accident, il y a quelques années. Alors qu’on transportait des bagages, le tricycle s’est renversé. J’étais à bord et je me suis blessé à la jambe droite. Comme vous le voyez, je marche désormais à l’aide d’une béquille. Je viens souvent au marché, certains me donnent 100 ou 500 FCFA et je me débrouille avec ça, parce que je ne peux plus travailler. J’ai l’espoir de retrouver l’usage de ma jambe et rentrer en Guinée. Pour le moment, je me soigne petit à petit », a-t-il fait savoir, les larmes aux yeux.