Concurrence diplomatique des grandes puissances : une aubaine pour l’Afrique


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La taille de l'Afrique et des Etats unis
La taille de l'Afrique et des Etats unis

L’Afrique est devenue, depuis quelques années, un enjeu stratégique, un terrain convoité par les grandes puissances. Russes, Chinois, Européens et Américains se bousculent aux portes du continent. Après Jill Biden, la Première dame des États-Unis, et le Secrétaire d’État américain, Anthony Blinken, c’est au tour de la Vice-présidente américaine d’engager une tournée africaine d’une semaine. Sans doute une chance pour l’Afrique.

Elle a foulé le sol ghanéen depuis dimanche. Une fois sur place, la Vice-présidente des États-Unis, Kamala Harris, a livré une petite allocution dont voici quelques extraits : « Quel honneur d’être ici au Ghana, et sur le continent africain. Je suis très enthousiaste quant à l’avenir de l’Afrique. Je suis très enthousiaste quant à l’impact du futur de l’Afrique sur le reste du monde. Quand je regarde ce qu’il se passe sur ce continent et le fait que l’âge moyen soit de 19 ans, ce que cela nous dit sur la croissance de l’innovation et des possibilités. Je vois en tout cela, une grande opportunité, pas seulement pour les Africains, mais aussi pour le reste du monde ».

Après son séjour qui doit durer trois jours en terre ghanéenne, Kamala Harris devra rejoindre la Tanzanie et la Zambie où s’achèvera la visite, le 2 avril prochain.

L’Afrique en position de force

L’intérêt des grandes puissances pour l’Afrique donne aujourd’hui plus que jamais la chance au continent de s’imposer dans les jeux d’alliances. Il lui offre l’opportunité de mettre en avant ses intérêts pour nouer de fructueuses relations et sortir des alliances ruineuses teintées de néocolonialisme et de paternalisme qui ont existé entre les pays africains et l’Occident depuis la fin officielle de la colonisation. Les pays anciennement colonisés par la France par exemple ont été coincés par des accords dits de coopération, mais qui, en réalité, annihilaient largement l’indépendance proclamée quelques semaines auparavant. Les accords ont été signés entre 1960 et 1961.

En fait, la manière dont le processus de décolonisation a été conduit dans les pays africains, surtout francophones, a largement fait de leur indépendance une coquille vide. Dit de façon simple, le colonisateur est juste parti physiquement pour mieux rester présent à travers des structures qu’il a mises en place. Lesquelles structures sont légitimées par les « accords de coopération ».

Et c’est ce rapport de dominant/dominé qui a prévalu depuis les indépendances jusqu’à ces dernières années. Dans ce qui était appelé son pré carré en Afrique, la France était toujours le principal partenaire économique. Jusqu’à ce que sur le continent ne commence un mouvement de la jeunesse qui se soulève pour chercher une autre voie. Un mouvement aujourd’hui largement exploité par la Russie et qui se traduit par un sentiment anti-français visible dans plusieurs capitales africaines. Nous mettons l’accent sur les pays francophones parce que c’est dans ces pays que le néocolonialisme se fait le plus ressentir. Le phénomène est moins criant dans les pays anglophones qui ont en outre su bénéficier d’une plus forte croissance économique..

L’heure du renouveau pour l’Afrique

Le temps où les survivances du pacte colonial dominaient le paysage des relations entre les pays africains et l’Occident est en train d’être révolu. Devenue un continent convoité et courtisée de toutes parts, l’Afrique doit savoir saisir sa chance, imposer ses vues pour tirer le meilleur parti du jeu. Voilà ce qui doit être le leitmotiv des dirigeants des États africains. Le temps des signatures d’accords de coopération bidon, sans réelle plus-value pour le continent semble révolu. Car, il n’est pas croyable que les richesses de l’Afrique enrichissent d’autres peuples au moment où les populations du continent croupissent dans la misère crasse. Il n’est pas normal qu’une tablette de chocolat d’à peine 300 grammes soit vendue à 3.10 euros alors que le kilogramme de cacao brut ne coûte que 1.3 euro (campagne cacaoyère 2022-2023).

Mais, avant tout, il reste à espérer que ce qui est une évidence pour l’Africain ou tout simplement l’être humain normal le soit également pour les dirigeants des pays du continent afin qu’ils ne gaspillent pas cette opportunité. Comme ils en ont l’habitude…

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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