Comment le Ghana est-il devenu une démocratie exemplaire ?


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John Atta Mils, le nouveau président ghanéen, est entré en fonction, ce mercredi, lors d’une cérémonie qui s’est déroulée à Accra. Un succès pour lui et la démocratie au Ghana, un exemple pour les autres Etats africains. Pourtant, tout n’était pas gagné pour ce pays du Gold Coast qui a subi, depuis son indépendance en 1957, deux putschs militaires. Afrik.com s’est penché sur les raisons de la réussite du Ghana en matière de transition démocratique. Analyse.

Le nouveau président ghanéen, John Atta-Mils, a pris ses fonctions, mercredi, à Accra. C’est la deuxième fois, en dix ans, qu’un chef d’Etat élu au Ghana transmettra le pouvoir à l’opposition à l’issue d’un scrutin. A 64 ans, l’ancien leader du parti de l’opposition (le Congrès national démocratique), peut se vanter d’être à la tête d’une nation érigée en modèle de démocratie pour l’Afrique.

Le Ghana, l’un des rares exemples de démocratie en Afrique

Le Ghana sert d’exemple aux autres pays africains qui n’ont pas réussi cette transition démocratique. « C’est un exemple rare de la démocratie en Afrique », expliquait à l’AFP, Raila Odinga, le Premier ministre kényan, après l’annonce de l’investiture du président sortant. Si les dirigeants des pays africains saluent la victoire de John Atta-Mils, ils ne minimisent pas le rôle de l’ancien chef d’Etat (2001-2009), John Kufuor, et du candidat malheureux du Nouveau parti patriotique, Nana Akufo-Addo, dans la tenue exemplaire de ces élections.

Selon Alpha Oumar Konaré, l’ancien président malien, interrogé par RFI, le Ghana a bénéficié du « leadership incontestable du président Kufuor qui, par sa déclaration, a amené tous les partis à accepter le verdict des urnes et de l’attitude de Nana Akufo-Adda qui n’a pas non plus contesté les résultats ». John Kufuor , un démocrate tenace dont les efforts en matière de démocratie et d’économie ont été régulièrement salués par la communauté internationale.

L’éducation, un atout pour le Ghana

Si en Afrique, plusieurs Etats peinent à organiser des élections libres après des putschs militaires, le Ghana fait figure d’exception. La raison ? Pour Prince Ofori-Atta, rédacteur en chef de la version anglaise d’Afrik.com et de nationalité ghanéenne, l’installation de la démocratie dans les mœurs est passée par l’éducation des masses. « Après l’indépendance, en 1957, l’objectif principal du gouvernement était l’éducation nationale. Cette vision contraste avec celle des autres pays comme la Côte d’Ivoire. Au Ghana, les présidents voulaient éduquer le peuple, en Côte d’Ivoire ils voulaient les nourrir, c’est là toute la différence. Une phrase du chef d’Etat Ghanéen, Kofi Bozia (1972-1978) illustre la politique de ce pays du Gold Coast : ’Donne à manger à quelqu’un et il reviendra te redemander de la nourriture, donne-lui des outils de développement et il ira se chercher lui-même à manger ‘ », explique-t-il. Selon Amnesty International, le taux d’alphabétisation au Ghana s’évaluerait à 57,9 % contre 48,7 % pour la Côte d’Ivoire, par exemple.

Jerry John Rawlings : un président qui a marqué le pays

Pour Christian Chavagneux, le rédacteur en chef adjoint d’Alternatives Economiques, la démocratie ghanéenne a émergé grâce au personnage du président Jerry Rawlings (1981-1996). « Ces quinze années au pouvoir ont été une période charnière pour le Ghana. Il y a eu une réelle refonte économique sous l’impulsion de Jerry Rawlings, qui s’est converti à l’économie de marché avec le soutien des institutions financières. Cette nouvelle stratégie a participé au changement politique, par exemple, des élections locales puis nationales ont été mises en place», affirme-t-il.

Néanmoins, Christian Chavagneux se veut prudent sur l’ancien président : « Rawlings n’est pas le symbole de la démocratie, il a réussi à amener son pays vers la démocratie, ce qui n’est pas la même chose. Il ne faut pas oublier qu’il est à l’initiative du coup d’Etat de 1981 ! ».

Le Ghana est l’exemple de la victoire de la démocratie en Afrique. Mais il aura fallu deux coups d’Etat, celui de Jerry Rawlings en 1981 et celui du colonel Ignatus Acheampong en 1972, pour qu’elle s’installe dans le pays.

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