Comment l’Afrique cherche à récupérer son or face aux multinationales étrangères


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Une pépite d'or
Une pépite d'or

De la RDC au Mali, les États africains montent au créneau contre les géants miniers étrangers. Alors que 435 tonnes d’or sont extraites illégalement chaque année du continent, les gouvernements durcissent leur législation et n’hésitent plus à affronter directement les multinationales. Le Mali ouvre la voie en réclamant plus de 500 millions de dollars à Barrick Gold et en arrêtant des dirigeants de Resolute Mining, signalant la fin d’une époque où les compagnies étrangères dictaient leurs conditions.

L’exploitation des mines d’or en Afrique révèle une réalité brutale. Sur ce continent qui abrite certains des plus riches gisements aurifères mondiaux, la majorité des bénéfices échappe aux populations locales, nourrissant plutôt les réseaux criminels et attisant les conflits. Pourtant, une dynamique de reprise en main se dessine.

Un secteur artisanal sous pression

Le Conseil mondial de l’or dresse un constat sans appel : l’exploitation artisanale et à petite échelle représente 20 % de l’approvisionnement mondial en or et mobilise 80 % des travailleurs du secteur. Cette activité, vitale pour des millions de personnes dans plus de 80 pays, reste marquée par des conditions de travail dangereuses. L’utilisation du mercure, le non-respect des normes environnementales et l’exploitation des enfants sont monnaie courante.

En Afrique, cette exploitation artisanale domine particulièrement au Burkina Faso, au Mali, au Ghana et en République démocratique du Congo (RDC). Opérant majoritairement dans l’informel, elle ouvre la voie à des pratiques illicites privant les États de ressources considérables. En 2022, le continent a vu 435 tonnes d’or extraites illégalement, soit 30,7 milliards de dollars évaporés dans la nature.

La mainmise des groupes armés

L’or artisanal attire les convoitises criminelles. Au Sahel, les organisations terroristes, qu’elles soient affiliées à Al-Qaïda ou à l’État islamique, imposent leur loi aux mineurs locaux sous couvert d’obligations religieuses. Ces « taxes » alimentent directement l’insurrection armée et l’instabilité régionale.

Dans ce jeu trouble, le groupe Wagner, aujourd’hui remplacé directement par la Russie, a su tailler sa part. Présent en Afrique centrale et occidentale, il aurait généré plus de 2,5 milliards de dollars depuis 2022 grâce à l’exploitation aurifère, des fonds réinjectés dans les opérations militaires russes en Ukraine.

Une riposte africaine s’organise

Face à cette situation, certains pays africains passent à l’offensive. Le Mali, notamment, mène une campagne sans précédent contre les grandes compagnies minières étrangères. En octobre 2024, Bamako réclame 512 millions de dollars à Barrick Gold pour des arriérés fiscaux. Le géant canadien, qui contrôle 80% des mines de Loulo-Gounkoto, se voit contraint de plier pour suspendre temporairement la procédure.

L’étau se resserre également autour de Resolute Mining Ltd. En novembre 2024, son directeur général Terry Holohan est arrêté dans un hôtel de Bamako avec plusieurs cadres. L’entreprise australienne, qui détient 80% de la mine stratégique de Syama, fait face à des accusations de faux et d’atteinte aux biens publics.

Cette offensive s’inscrit dans une refonte complète du secteur minier malien. Le ministre des Mines annonce que la révision des contrats avec B2Gold, Allied Gold et Robex devrait rapporter 245 milliards de francs CFA supplémentaires par an. L’objectif est d’augmenter la participation étatique de 20% à 35% dans les projets miniers et de réduire les avantages fiscaux des entreprises étrangères.

Le coût humain et environnemental

Sur le terrain, les communautés locales paient le prix fort. La déforestation s’accélère, les sols et les cours d’eau sont contaminés par le mercure et le cyanure. Les conflits pour le contrôle des ressources forcent souvent les populations à l’exode.

Travail des enfants
Travail des enfants

En RDC, la situation est particulièrement critique. Les milices armées contrôlent la majorité de l’exploitation artisanale, soumettant les mineurs à des extorsions systématiques. Un rapport de 2017 révèle que presque tout l’or artisanal du pays échappe aux circuits officiels.

Des initiatives émergent pour formaliser l’exploitation artisanale. La Convention de Minamata sur le mercure et les Principes d’extraction responsable du Conseil mondial de l’or proposent des cadres réglementaires. Mais leur mise en œuvre se heurte au manque de coopération internationale et de volonté politique.

Le message des gouvernements africains aux investisseurs étrangers devient pourtant plus ferme : l’ère des contrats déséquilibrés touche à sa fin. Les compagnies minières devront contribuer davantage au développement local et accepter un contrôle accru de leurs activités. Cette dynamique, observée au Mali mais aussi au Burkina Faso et au Niger, pourrait marquer un tournant dans la gestion des ressources aurifères du continent.

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