Le Collectif Dom, association constituée d’Ultramarins, vient d’avoir gain de cause avec l’exclusion du Parti Socialiste, samedi dernier, de Georges Frêche, le président du Conseil Régional de Languedoc-Roussillon. Ils avaient menacé la candidate du Parti Socialiste aux élections présidentielles d’avril prochain, Ségolène Royale, de manifester contre sa visite aux Antilles. Entretien avec son président et porte-parole, l’écrivain Claude Ribbe.
Le Collectif des Antillais, Guyanais, Réunionnais et Mahorais – le Collectif Dom – est un lobby qui lutte pour l’égalité des droits et contre les discriminations qui touchent les Français originaires d’Outre-Mer. Il compte, selon ses responsables, 10 000 membres et 30 000 sympathisants.
Afrik.com : Vous réclamiez l’exclusion de Georges Frêche pour avoir déclaré qu’il y avait trop de Noirs dans l’équipe de France de football et vous avez obtenu gain de cause samedi dernier. Comment avez-vous accueilli la nouvelle ?
Claude Ribbe : Nous avons déjà exprimé notre satisfaction à travers un communiqué. L’action du Collectif Dom a beaucoup compté dans cette décision. Nous avions déjà été les seuls à déposer une plainte, en novembre dernier, contre Georges Frêche. Quand nous avons vu les différentes manœuvres de ce dernier pour échapper à une sanction et entendu les propos de Ségolène Royal (elle se contentait de la décision de M. Frêche de se mettre en congé du parti, ndlr), nous sommes montés au créneau. Dès le lendemain de cette déclaration, nous avons décidé de lancer un appel à manifester contre sa visite aux Antilles. A la suite de cette décision, un de nos membres a pris l’initiative de rentrer en contact à Victorin Lurel (président du Conseil régional de la Guadeloupe, ndlr), également membre du Collectif Dom, qui nous a servi d’intermédiaire avec Ségolène Royal. D’autant plus qu’il lui avait transmis trois lettres dans lesquelles, il réclamait déjà l’exclusion de M. Frêche. Il ne faut pas que cette décision du PS fasse oublier les autres cas, par exemple, celui de Pascal Sevran, bien que ce dernier ne soit pas un élu. Nous avons également déposé une plainte contre lui. Nous avons déjà obtenu que son émission ne soit plus diffusée sur RFO.
Afrik.com : Vous souhaitez par conséquent que cette décision fasse jurisprudence ?
Claude Ribbe : Notre démarche ne visait pas à nuire à Mme Royal, ce n’était absolument pas l’objectif. Nous sommes conscients qu’il y a d’autres cas et nous souhaitons que les politiques, les intellectuels, des animateurs cessent de tenir des propos racistes en toute impunité. Il faut que tous ces propos soient censurés. Il faut attaquer les racistes partout où ils sont. Nous n’oublions personne et je n’oublie personne dans mon prochain livre Les Nègres de la République. Nous continuerons de maintenir la pression sur Georges Frêche, qui est toujours un soutien de Ségolène Royal. Tout comme, Louis Le Pensec, qui voté l’article 4 de la loi du 23 février sur le rôle positif de la colonisation, est le conseiller de Mme Royal sur les questions relatives à l’Outre-Mer. Ce monsieur n’a rien à faire aux côtes de la candidate PS d’autant que Victorin Lurel, qui l’a toujours soutenue et qui est le secrétaire national de l’Outre-Mer au PS, serait plus qualifié. Les politiques ne comprennent apparemment que les rapports de force et la campagne pour les présidentielles est une bonne période pour s’attaquer à cette question du racisme. Nous avons l’intention d’épurer les racistes de chaque comité de soutien sans aucune prise de position partisane. Les Ultramarins et les Afro-Français devraient d’ailleurs se fédérer sur ces questions, car notre combat est le même.
Afrik.com : Les hasards du calendrier de Ségolène Royal ont bien servi votre action…
Claude Ribbe : Elle s’est servie de nous et nous d’elle. Le Parti Socialiste aurait dû statuer sur le cas Frêche depuis décembre dernier. Mais les 23 sages du PS, qui ont voté samedi dernier à l’unanimité son exclusion, ont reporté leur réunion au 27 en sachant qu’une décision de justice tomberait le 25. Leur sanction aurait due être plus rapide, mais ils ont attendu deux mois. Si les propos de Georges Frêche avaient concerné une autre communauté, ils se seraient certainement montrés plus diligents. Nous ne voulons pas qu’il y ait deux poids, deux mesures. Toute déclaration raciste doit être immédiatement et sévèrement sanctionnée.
Afrik.com : Comment comptez-vous imposer le thème de la discrimination et de la lutte contre le racisme, qui est en l’occurrence très peu évoqué si ce n’est à travers quelques formules choc, dans le débat actuel ?
Claude Ribbe : Nos actions seront démultipliées parce que nous souhaitons être présents dans le débat. Nous avons un rôle à jouer et notre voix s’exprimera par le vote. Nous exercerons sur les leaders politiques la même pression exercée par Nicolas Hulot sur la question de l’environnement. Nous allons les pousser dans leurs derniers retranchements au PS, à l’UDF et à l’UMP. Nous saurons ainsi lequel est raciste et si tous les trois le sont, nous appellerons tout simplement à ne pas voter pour eux.