Ciné à la sauce Odoutan


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arton3914

Mama Aloko, le dernier film du Béninois Jean Odoutan, cuisine avec bonheur la communauté africaine de Paris en général, et du quartier Sainte-Marthe en particulier. Un film drôle et sympathique d’un réalisateur qui a su remplacer l’argent par des idées.

Ca crie, ça hurle son amour ou sa haine, ça gesticule, ça se déchire, ça se bagarre. Le dernier film du Béninois Jean Odoutan explose dans tous les sens. Haut en couleurs, à tous les sens du terme, Mama Aloko entraîne par son dynamisme. Sur les musiques endiablées écrites et interprétées par le réalisateur, le quartier Sainte-Marthe, dans le Paris bellevillois, est en ébullition. Mama Aloko, qui tient le restaurant du même nom, craint une visite de l’inspecteur sanitaire.

Avec son frigo tombé en rade, elle peut s’inquiéter pour l’avenir de sa gargote. Mama Aloko (alias Laurentine Milebo) est victime de son coeur généreux : elle nourrit les sans-famille (les jeunes et turbulents échappés de la DDASS), les sans-logis et les sans-amis de barquettes garguantuesques d’aloko (bananes plantain frites). Mais sa caisse reste vide. Malgré les courses en vélo publicitaires de son fils Jean, interprété par Jean Odoutan, rassembler les 1 000 francs nécessaires à l’achat d’un nouveau réfrigérateur semble très difficile.

Répliques cinglantes

A travers cette histoire, le réalisateur portraite la communauté africaine de Paris. On déambule entre les amies de Mama Aloko, pétillantes et débrouillardes. Son fils Jean, diplômé mais sans travail car  » pour être prof, il faut se faire naturaliser « . Sa petite amie, Eve, fille de diplomate, née à Paname et qui, sans avoir mis les pieds sur le continent, lui reproche de ne pas mettre ses capacités à profit  » au bled  » et Sister beautiful legs, prostituée à la voix d’or qui accompagne le film par un air de jazz –  » The man I love  » – qu’elle remanie à sa sauce.

Répliques cinglantes, humour, clins d’oeil (des affiches, un tee-shirt qui rappellent les anciens films du réalisateur, Djib et Barbecue Pejo) et la radio en fond sonore :  » Jean Odoutan, le plus grand cinéaste de tous les temps, donne une interview en direct de Cannes…  » Une dérision qui permet au réalisateur de s’accrocher et de continuer à faire des films. Mama Aloko a coûté 200 000 francs (le montant de la subvention du ministère des Affaires étrangères).

 » Quand on fait un long-métrage avec cette somme, on obtient tout à l’arraché. L’esthétique ne rentre pas en ligne de compte, même si on l’a constamment à l’esprit. C’est juste qu’on est débordé par la question de l’existence même du film « , explique Jean Odoutan. Avec les moyens du bord, il offre un film dynamique, original et brut de décoffrage.

Mama Aloko, de Jean Odoutan, France-Bénin. 1h30. Sortie française le 26 janvier 2002.

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