Changer le regard de la presse sur les banlieues en France


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Raphaël Yem, Noël Mammère et Max Lebon

Parce que les grands médias jettent toujours un regard partial et caricatural sur les banlieues françaises et ceux qui y habitent, l’agence de presse Ressources Urbaines et le Centre de Formation des Journalistes (CFJ), soutenus par plusieurs associations et organes de presse ont décidé de publier une « Charte Médias en Banlieue ». Ils la présentaient mercredi dernier, à l’Assemblée Nationale, sous le haut patronage du député Vert Noël Mamère.

Susciter un dialogue entre les rédactions, les acteurs des médias issus des quartiers et l’ensemble des acteurs des banlieues, améliorer le traitement médiatique des banlieues par cet échange, c’est l’objectif de la Charte Médias en Banlieue présentée, mercredi 7 novembre, à l’Assemblée Nationale. A l’origine de cette initiative, Ressources Urbaines, l’agence de presse des quartiers, et le Centre de Formation des journalistes (CFJ), soutenus par le Bondy blog, la radio Générations, l’association La Cathode et le magazine Fumigène.

« L’idée du document est née l’année dernière, un an après les émeutes urbaines. L’état d’urgence avait été proclamé en France [le 7 novembre 2005, ndlr], puis suspendu. Mais il y avait toujours une urgence médiatique à traiter », a expliqué Erwan Ruty, fondateur de Ressources Urbaines et initiateur du projet. Pour lui, la situation s’est améliorée depuis l’automne 2005, des magazines plus sérieux sont réalisés sur les banlieues et des témoignages qu’on n’aurait pas imaginé entendre dans la presse généraliste quelques années auparavant sont diffusés. Mais il estime toutefois que de nombreux efforts restent à faire : « Les journalistes de l’audiovisuel ont toujours du mal à travailler sur place, et l’amélioration est imperceptible pour nombre d’habitants des banlieues et même en dehors. Il y a encore pas mal de chemin à faire pour changer leur point de vue et le regard caricatural des médias. »

Concrètement, les initiateurs du projet appellent les médias à signer la charte, à réfléchir et échanger régulièrement avec les acteurs et organes de presse de terrain. « Il faut qu’on arrive à se rencontrer régulièrement pour mettre en valeur les initiatives positives, innovantes, et parler de ce qui ne va pas aussi, mais sereinement », a déclaré Erwan Ruty. D’autre part, Raphaël Yem, rédacteur en chef du magazine Fumigène, a évoqué plusieurs pratiques, telles que les conférences de rédaction délocalisées et les duos entre les grands médias nationaux et la presse de la diversité, qui pourraient, si elles étaient encouragées, favoriser la sensibilisation aux réalités des banlieues.

Un combat difficile

Devant la trentaine de journalistes et responsables associatifs qui s’étaient réunis pour l’occasion, le député écologiste (Vert) Noël Mammère, sollicité parce qu’il est un ancien journaliste et qu’il bénéficie d’un certain crédit dans les quartiers populaires, a salué l’initiative qui devrait, selon lui, favoriser « une prise de conscience de ce qui se passe sur le terrain. » Il en a profité pour égratigner le gouvernement qui « n’a pas d’idée » pour les banlieues et la secrétaire d’Etat à la Politique de la ville, Fadela Amara, « qui ne sait pas ce qu’elle veut. » Il a néanmoins confié qu’il était « sans illusion » quant à l’amélioration du traitement de l’information par les grands médias généralistes « saisis par le syndrome de l’émotion et de l’immédiateté. »

Face à ce problème, Farid Mebarki, journaliste et membre fondateur de Ressources Urbaines, a souligné la nécessité que les écoles de journalisme intègrent des jeunes issus des quartiers populaires dans leurs effectifs afin que les rédactions des médias français s’ouvrent à la diversité et fassent, peut-être, évoluer leurs lignes éditoriales. Malheureusement, les responsables du CFJ, pourtant co-initiateurs de la charte, n’étaient pas présents et n’ont pu présenter leur point de vue.

Parmi les représentants du secteur associatif soutenant le lancement de la charte, Jean-Claude Tchikaya, membre du Collectif Devoirs de Mémoires et adjoint au maire de Bagneux, a tenu à rappeler que les médias nationaux devaient aussi se préoccuper des réalités des quartiers populaires des départements d’Outre-mer français, car jusqu’à ce jour « ils sont traités comme s’il s’agissait du tiers monde alors qu’ils font partie de notre nation. »

Afrik.com, qui traite régulièrement l’actualité des banlieues en France, a été particulièrement sensible à l’opération initiée par Ressources Urbaines. Invité à signer la Charte Médias en Banlieue, il apportera sa contribution à ce projet citoyen.

Pour plus d’information et lire la charte en ligne, consulter le site de Ressources Urbaines.

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Journaliste, écrivain, dramaturge scénariste et réalisateur guadeloupéen. Franck SALIN fut plusieurs années le rédacteur en chef d'Afrik.com
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