Président du ?Mouvement de libération du peuple centrafricain (MLPC)?, leader de l’opposition depuis des années en Centrafrique, Martin Ziguélé, qui a aussi été le Premier ministre de l’ancien chef de l’Etat Ange Félix Patassé, est aujourd’hui annoncé comme le candidat le mieux placé pour l’élection présidentielle qui devrait se dérouler avant la fin de l’année.? Interview recueillie par Adrien Seyes. ?
AFRIK.COM : Le dernier calendrier électoral vient d’être officiellement entériné. Celui-ci vous semble-t-il tenable ? Ou bien y a-t-il un risque de nouveau report compte tenu de la situation sécuritaire ?
Martin ZIGUELE : Le calendrier électoral est tenable. Et toute la population centrafricaine tient désormais à aller au vote le plus tôt possible. Six premières candidatures aux élections présidentielles, dont la mienne, ont d’ailleurs été déposées ce samedi auprès de l’Autorité Nationale des Elections (ANE). Les listes des électeurs enrôlés ont, elles, commencé à être publiées dans certains centres d’inscription de Bangui, conformément au chronogramme rendu public. L’hypothèque principale, qu’il faut absolument régler pour permettre aux populations de se mobiliser au maximum et de prendre part aussi bien aux meetings politiques qu’aux scrutins, concerne la sécurité. Les violences qui visent les populations civiles, tant à Bangui que dans certaines villes de l’intérieur du pays comme Bambari, sont susceptibles en effet de compromettre le bon déroulement du processus électoral si des actions vigoureuses ne sont pas entreprises pour les juguler.
AFRIK.COM : Comment expliquez-vous qu’avec autant de troupes onusiennes en RCA, dont le mandat est clair qui plus est, la spirale de la violence ne soit toujours pas enrayée ? Et qu’en est-il du tribunal spécial un temps évoqué pour juger les fauteurs de troubles ?
Martin ZIGUELE : Les forces internationales en RCA ont fait un travail énorme pour que le pays soit plus sûr qu’en décembre 2013. Personne ne peut en douter. Elles ont perdu et continuent de perdre des hommes sur le champ de bataille, et je ne peux que leur en rendre hommage. C’est depuis septembre 2015 que les formes de violence ont changé, et nécessitent une réadaptation des stratégies mises en œuvre par ces forces internationales. Les actions doivent être plus vigoureuses. Il y a urgence à cela car tous ceux qui ont intérêt au statu quo sont déterminés à perturber le processus électoral. Il faut les mettre hors d’état de nuire.
Quant à la Cour Pénale Spéciale pour la RCA, celle-ci a déjà été créée par la loi mais son démarrage effectif est encore attendu. Sur ce plan aussi, il faut faire vite car il n’y a pas de paix durable sans justice véritable.
AFRIK.COM : Vous êtes considéré par la plupart des observateurs comme le grand favori du prochain scrutin présidentiel dans votre pays. Comment l’expliquez-vous ?
Martin ZIGUELE : (Sourire) Cela s’explique par plusieurs raisons. Tout d’abord, je ne suis pas un inconnu puisque je vais à ces élections pour la troisième fois et j’avais déjà mis en ballotage le Président candidat lors de mon premier engagement en 2005. Ensuite, il est à noter que c’est la première fois qu’il n’y a pas de chef d’état candidat en lice, ce qui rend le jeu ouvert. Par ailleurs, je connais le pays pour l’avoir parcouru commune par commune, et village par village dans le cadre de mes anciennes fonctions de Premier Ministre et ensuite comme Président du MLPC, qui demeure le principal parti politique centrafricain. Enfin, nous sommes implantés comme parti dans tout le pays, et ce maillage complet du pays est bien sûr un atout. Il faut aussi noter que nous avons noué et continuons de nouer des alliances pour maximiser ce maillage. Nous restons vigilants mais sommes confiants pour les élections à venir, législatives comme présidentielle.
AFRIK. COM : Si vous êtes élu président de la RCA, quelles sont les trois mesures prioritaires que vous prendrez ?
Martin ZIGUELE : Mon projet politique est présenté en détail dans le livre que je viens de publier (NDLR : « Des crises à l’espérance. Ma vision pour la Centrafrique« , Editions Dagan). Mon programme est basé sur le triptyque « Réconciliation, Rassemblement et Reconstruction ». Les trois premières mesures à mettre en œuvre seront les suivantes : réformer le secteur de la sécurité et le DDRR (Désarmement- Démobilisation-Réinsertion-Rapatriement), redéployer l’administration partout sur le territoire national afin de réhabiliter l’État et relancer l’économie pour, en particulier, garantir un avenir digne à notre jeunesse.