C’est au cœur du massif des Aurès, dans le sud de l’Algérie et de la Tunisie actuelles, que vivait au VIIe siècle la puissante tribu berbère des Djerawa, dont Kahena était la reine. Cette dernière a combattu les Omeyyades lors de l’expansion islamique en Afrique du Nord. Elle demeure aujourd’hui une légende dans la région.
Muawiya Ier, le chef de la dynastie omeyyade, décide dans la seconde moitié du VIIe siècle d’envahir les Aurès, dominés par le brave Kusayla. Ce grand guerrier oppose une vive résistance au général omeyyade Oqba Ibn Nafi Al Fihri, à qui il reprend même Kairouan. Les Arabes buttent ainsi sur les chrétiens d’Afrique du Nord d’origine byzantine et sur les Berbères. Cependant, Kusayla est tué en 686 lors d’une bataille et remplacé par la reine de la tribu berbère des Djerawa, Dyhia (surnomée Kahena, « devineresse » en arabe).
Bien que Kusayla se soit converti à l’islam, Kahena est vraisemblablement juive, chrétienne ou polythéiste. Elle appelle à l’aide toutes les tribus d’Afrique du Nord pour chasser définitivement les Omeyyades. Les Banou Ifren sont les premiers à répondre à son appel. Le commandant des troupes musulmanes, Hassan Ibn Numan, est défait une première fois par les troupes de la reine, dans la région constantinoise. Cette prestigieuse victoire, aussi appelée « bataille des chameaux » permet de repousser les troupes califales jusqu’en Tripolitaine. La Kahena remporte une nouvelle victoire près de Tabarqa en 695. Un mythe se construit alors autour de cette femme, aux pouvoirs étranges, qui parvient à résister aux légendaires armées arabes.
La fin d’une résistance mythique
Face à la solidité de Dyhia, Ibn Numan reporte ses efforts sur Carthage et sur les côtes. Puis, il demande de nouvelles troupes au calife Ibn Marwan, qui arrivent graduellement en Berbérie. La Kahena se sent vite débordée et limite sa résistance aux Aurès. Elle pratique même la politique de la terre brûlée afin de freiner l’avancée de l’envahisseur arabe. Dans un dernier élan de rage, elle se lance en 702 dans son ultime bataille, à Tabarqa. Elle est trahie pendant les combats, entre autres par Khalid, un jeune Arabe qu’elle avait pourtant épargné et adopté. Voyant que la guerre touche à sa fin, elle envoie Ifran et Yazdia, ses deux fils, à Ibn Numan. Elle continue toutefois le combat, mais trahie une nouvelle fois, elle est capturée et décapitée près d’El-Djem. Sa tête est envoyée en trophée au calife Abd al-Malik en Syrie. La plupart de ses guerriers sont alors enrôlés dans les armées musulmanes afin de conquérir l’Andalousie.
Dihya reste pour les Maghrébins, les Berbères ou les Arabes, le chef militaire de la région qui a donné le plus de mal aux puissantes troupes omeyyades. Son courage, son irréductibilité et sa fierté, en font de nos jours, particulièrement en Kabylie, le symbole de la résistance aux Arabes et du refus de l’assimilation. Elle incarne à elle toute seule l’insoumission amazigh.
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