C’est un homme, c’est une femme et ce sont trois poètes, trois chantres de la Négritude, trois monuments : Césaire, Damas et Senghor. Black Label, Cahier d’un retour au pays natal, Discours sur le colonialisme… des textes poétiques et politiques, ici mis en espace tantôt comme des monologues, tantôt comme une conversation. Une Causerie imaginée interprétée par Jean-Michel Martial et Nathaly Coualy, au théâtre Les Feux de la Rampe, à Paris.
Nathaly Coualy s’est faite très femme pour porter ces trois voix masculines. Sa grâce chatoyante alterne avec le jeu sobre et la voix aux accents graves de Jean-Michel Martial. Leur complicité sur scène est tangible. Pourtant, les deux comédiens, qui se sont rencontrés à l’occasion d’une lecture commémorative du discours de Delgrès, n’avaient jamais encore travaillé ensemble. « Cela fait plusieurs années que je lis ces textes en public », explique Jean-Michel Martial. « Cette fois, j’ai voulu y ajouter l’envie et l’émotion de cette personne que je ne connaissais pas ». « La trame était déjà plus ou moins décidée, mais Nathaly y a apporté des choses auxquelles je ne m’attendais pas » se souvient le comédien. « On a découvert que ces textes se répondaient » relate la comédienne. La répartition des extraits s’est faite suivant les affinités et le désir de chacun, et non suivant des nécessités de mise en scène. Ainsi, de manière inattendue, c’est Nathaly Coualy qui prête sa voix à l’envolée amoureuse et sensuelle de Senghor, Femme nue, femme noire.
Le spectacle se présente pour le moment comme une lecture, textes en main. Selon Jean-Michel Martial, « la lecture permet de garder la notion de l’écrit. C’est un hommage au texte écrit. La lecture instaure également une distance intéressante. » Nathaly Coualy précise cependant que « le spectacle en est à ses débuts. Nous ne savons pas encore comment il va évoluer. Nous aimerions surtout qu’il voyage. » Et pas seulement dans de petites salles intimistes. « La puissance de ces textes supporte sans problème des salles de 250 personnes ou plus », souligne Jean-Michel Martial.
Faire entendre des textes fondateurs
Quelle que soit la forme que prendra cette Causerie imaginée, les comédiens s’accordent à dire qu’il s’agit avant tout de donner à entendre et à connaître ces textes fondateurs, fondamentaux, pourfendeurs du colonialisme, témoignages sans concession « d’un moment par lequel passe notre histoire », précise Jean-Michel Martial en ajoutant que « notre histoire commence bien avant ce moment, ne se résume pas à ce moment et ne saurait s’y arrêter ». Les faire (re)découvrir, y compris dans la communauté afro-antillaise : « cela reste nécessaire, même aujourd’hui », affirme Nathaly Coualy. « Moi-même, j’avoue avoir réalisé, en préparant cette lecture, que je connaissais mal certains de ces textes. Et d’une certaine façon, je les découvre encore », ajoute la comédienne. « On se « recharge » de ces textes à chaque fois qu’on les relit » remarque Jean-Michel Martial.
Comme pour illustrer les propos des comédiens, un jeune homme me demandera à la sortie du théâtre : « C’étaient des textes de Césaire, c’est ça ? ». Le nom de « Damas » ne semble pas lui dire grand chose, mais, son regard embué en atteste, l’émotion était bien là.
Causerie imaginée
Lecture de textes de Césaire, Damas et Senghor
Mis en scène et avec Nathaly Coualy et Jean-Michel Martial
Lumières de Fernando de Azevedo
Dimanche 28 février à 17h
Au théâtre Les Feux de la Rampe
2, rue Saulnier Paris 9e
01 42 46 26 19
lesfeuxdelarampe@gmail.com
https://www.billetreduc.com/35062/evt.htm
Théâtreonline.com ou 0820 811 11 (0,12TTC/min)