La Britannique Catrin Finch et le Sénégalo-Malien Seckou Keita viennent de sortir un album, « Soar » (bendigedig), mariage merveilleux entre la harpe classique et la kora sahélienne, musique enchanteresse qui semble directement tombée du paradis…
Mardi 30 octobre dernier, à l’Espace Jemmapes à Paris, tous deux nous offraient un concert qui fut un pur moment de grâce, dans le cadre du Festival « Villes des Musiques du Monde », qui se tient chaque année à l’automne autour des musiques du monde à Paris et en banlieue, et qui compte encore de nombreux concerts jusqu’à fin novembre.
Les deux artistes viennent pourtant de deux univers totalement différents : Catrin, qui joue de la harpe depuis l’âge de 6 ans, a suivi une formation classique, diplômée de la très prestigieuse Royal Academy of Music à Londres, d’où elle est sortie avec les Félicitations d’Excellence de la Reine. Son talent exceptionnel à la harpe a convaincu le Prince de Galles, le Prince Charles, de la nommer « Harpiste Royale » en 2000, titre qui n’avait pas été attribué à un(e) harpiste depuis le règne de la Reine Victoria, en 1873…
Seckou, comme l’immense majorité des joueurs de kora en Afrique, a quant à lui une formation d’autodidacte, ayant appris l’instrument, sans solfège et sans partition comme ses pairs, à 7 ans, en regardant jouer son oncle et son grand-père. Enfant et adolescent prodige, son oncle Solo Cissokho, musicien confirmé, l’introduit en 1996 dans le milieu des scènes internationales, et Seckou accompagne bientôt les plus grands musiciens, de Paul Simon à Manu Dibango en passant par Miriam Makeba.
Catrin et Seckou, qui avaient tous deux produit de nombreux albums en solo, avaient déjà collaboré en 2013 sur un album en duo, « Clycham Dibon », salué unanimement par les médias britanniques, consacré « Meilleur album de l’année » par plusieurs classements, et qui leur avait valu une tournée mondiale.
Ce deuxième disque ensemble vient confirmer l’émergence d’une des plus splendides formations de musiques d’aujourd’hui, le duo Catrin Finch/Seckou Keita entrant désormais dans la famille des ensembles qui marqueront l’histoire de la musique, tels le Trio Cortot-Thibaud-Casals ou le Duo Dietrich Fischer-Diskau/Gerald Moore.
Et cette référence à des ensembles de musique dite « classique » en Europe n’est pas fortuite : car si Catrin a été nourrie de musique « classique » européenne, de par sa formation, et du répertoire de cet instrument, Seckou a pareillement été nourri de la musique « classique » de l’Afrique de l’Ouest, et du Sahel plus précisément. Musique classique d’Afrique qui est tout aussi noble, même si elle s’est perpétuée, depuis des siècles tout comme la musique « classique » européenne, sans partitions écrites et sans salles de concerts à sièges en velours, mais plutôt dans des cours en plein ciel et sur terre battue…
Mais la musique de Catrin et Seckou parle d’elle-même, et si un concert de ce duo exceptionnel est un pur moment de grâce, le disque, écouté chez soi à la maison, vous apportera cette atmosphère de bonheur, de sérénité, de paix, et de spiritualité mêlés, qui signent cette musique créée par deux anges…
PS : En février de cette année (2018), Catrin apprenait, en informait son public, qu’on venait de lui découvrir un cancer du sein de Grade 3. Elle s’est courageusement battue contre la maladie, annulant ses concerts à l’étranger pendant plusieurs mois, ne cessant jamais de jouer de la harpe, et informant ceux qui l’aiment, sur sa page Facebook, de ses progrès, n’hésitant pas à se faire photographier tête rasée, soufflant ses bougies d’anniversaire…
La maladie a été vaincue ! Grâce à Dieu ! Et nous sommes doublement admiratifs, devant l’artiste Catrin et la femme, à qui nous souhaitons tout le bonheur qu’elle mérite.