Les îles accouchent souvent de grands cyclopes. Les îles océanes, celles qui nichent dans l’immense. Au Cap Vert, le cyclope s’appelle Tchalé Figueira et certains préfèrent dire qu’il est un chef comanche ou un guerrier sioux. Ce qui est un peu la même chose, dans l’infinie prairie, l’œil pointé sur l’horizon. Peintre donc, mais aussi musicien, poète et romancier, Tchalé est un baroudeur onirique et sa tribu est le ciel. Étude de deux tableaux du peintre.
Exposition Tchalê Figueira : « Certains souriant, d’autres apeurés… »
Il y a quelque chose de mythologique dans cette peinture. Aussi ordonnée qu’un drame antique, et parcourue de multiples tressaillements. Tchalê Figueira poursuit depuis presque 40 ans une écriture picturale entre la Méditerranée et l’Afrique, entre la légende et la mouvante réalité. Cap-Verdienne et insulaire, une création métisse faite de ciel et de sentiment. Exagérée ? Oui, et ça lui convient fort bien !
C’est de peinture que l’on parle ici… Et de celui qui tient le pinceau, comme on tient un gouvernail, dans ce remous perpétuel et sans répit.
Ces peintures sont toutes (ou presque) de cette année 2020. L’étonnante année que ce fut, révélatrice, abondante et chaotique, et dont Figueira a pu enfanter quelques joyeux vagissements. Effectivement, s’il peint et s’il écrit, s’il « percussionne » parfois, amoureux des mots et des couleurs, Tchalê est aussi accoucheur.
L’Infante est vivante : Carnaval Queen
Il ne s’éloigne jamais vraiment de son île. L’attache est profonde, mais elle le laisse néanmoins naviguer. Il y a quelques années déjà, Tchale Figueira a croisé la peinture de Velasquez. Il le dit très simplement, toute cette beauté le sidère, mais aussi la part du mystère. Ces regards, ces instants surpris et l’ombre qui dérobe. Alors, il a voulu revenir à ce tableau, le portrait de l’Infante Marguerite Thérèse, peint (vers) 1654. Une jeune fille, les yeux cernés, si pâle dans cette robe immense, si fragile et incertaine, et qui un jour sera reine.
Et puis Tchale Figueira revient sur son île bien aimée. « J’ai un amour particulier pour les reines de carnaval, elles travaillent dur pour le défilé, toute une année et elle ne seront reines qu’un jour. C’est l’éphémère des choses, mais elles nous donnent de la joie. Le carnaval fait partie de mon identité cap-verdienne. Je voulais déjà rendre hommage à cette beauté qu’elle nous donne. Et en prenant appui sur cette jeune fille de Vélasquez, dans cette attitude qu’elle inspire, comme lors d’un essayage, elle attire toute la lumière. Elle est une reine… »
Et rien ne va altérer cette toile ou la parasiter. Tchale peint souvent dans de grands débordements, les sentiments, le mouvement et la musique. Ici la brosse reste à la lumière et aux motifs de cette robe, dans une ponctuation de coquelicots, fleurs merveilleuses autant qu’éphémères. La toile la plus sobre qu’il nous livre et qui révèle cette fois l’évidente fragilité du jeu.
Carnaval Queen, 108 x 89 cm, huile et acrylique sur toile, 2020
RC (ZO mag’)
Photo : ©Tchale Figueira
ZO Mag’
Arts
« Certains souriant, d’autres apeurés… » est sa première exposition virtuelle.
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