Un incendie, probablement d’origine criminelle, a détruit dans la nuit de mercredi à jeudi des bâtiments traditionnels et des objets anciens de la chefferie de Bandjoun, à l’Ouest du Cameroun. Le site, fondé au 17ème siècle, est composé d’un palais royal, d’un musée, et de différentes cases à l’architecture typiquement bamilékée.
Par Valentine Lescot
Drame pour la culture et le patrimoine du Cameroun. La chefferie de Bandjoun, à 300km de Yaoundé (Cameroun), a été touchée par un incendie dans la nuit de mercredi à jeudi. Les flammes ont détruit un bâtiment traditionnel orné de sculptures, appelé la Grande Case du peuple, deux cases dîtes des “ sociétés secrètes ” datant des années 1930, ainsi que la réserve du musée du Palais. Celle-ci contenait environ un millier d’objets qui faisaient partie des collections du roi et des dignitaires : statuettes, trônes, bijoux en perles, costumes, masques, poteries, bronzes et tissus bamilékés. Parmi ces pièces, certaines dataient du 18ème siècle. Les archives du palais, qui couvrent l’histoire de la famille royale au 20ème siècle, s’y trouvaient également. L’inventaire de la réserve venait tout juste de commencer.
“ C’est la désolation ”, dit au bord des larmes le conservateur du musée Taboue Flaubert. “ Plus personne dans le village ne dort. Des Badjounais sont revenus au pays constater les dégâts. Nous sommes encore en train d’éteindre les restes de l’incendie. Le feu, qui a démarré à 2h du matin, est parti de plusieurs pôles de la chefferie. C’est un acte de terrorisme ”, nous confiait-il vendredi après-midi. La police voit également là l’œuvre d’une “ main criminelle ”. Une enquête est en cours. Quelques bronzes, poteries et bouts de tissus ont pu être récupérés. La salle d’exposition permanente du musée, où se trouvent 122 pièces, demeure heureusement intacte.
La Grande Case du peuple, monument phare du pays bamiléké
Vieille de trois siècles, la chefferie de Bandjoun est l’une plus importantes du Cameroun et compte 200 000 membres. Au centre du Palais se trouve la Grande Case du peuple, utilisée comme salle de réunion pour les dignitaires. Haute de 23 mètres avec un toit de chaume reposant sur 60 piliers en bois sculptés, elle est considérée comme le “ monument phare du pays bamiléké ”. Le bâtiment, fondé au 18ème siècle, est régulièrement reconstruit depuis. Le musée a été crée en 2003 à partir d’une galerie d’exposition des collections ouverte dans les années 1960, avec l’aide d’une organisation non gouvernementale italienne (COE). Un catalogue sur le patrimoine bandjoun va être édité prochainement.
Bandjoun est un site que les touristes ne manquent pas de visiter. Le conservateur souhaite sa réhabilitation prochaine : “ Les sculpteurs sont déjà à pied d’œuvre, surtout les plus vieux, détenteurs du savoir-faire. Ils veulent que le lancement des travaux se fasse le plus rapidement possible ”. Avant qu’eux-mêmes ne disparaissent.