Au moins sept personnes ont été tuées dans la zone anglophone du Cameroun ce week-end lors d’une déclaration symbolique d’indépendance. Les séparatistes avaient choisi le 1er octobre, anniversaire de la réunification officielle des régions anglophones et francophones du Cameroun, pour déclarer l’indépendance de l' »Ambazonia », le nom de l’Etat qu’ils veulent créer.
Le gouvernement a déployé des forces de sécurité ce week-end dans les régions anglophones, notamment Buea au sud-ouest et Bamenda, la ville principale au nord-ouest où la minorité anglophone proteste régulièrement contre la discrimination dont elle s’estime victime.
Plusieurs personnes ont été admises à l’hôpital de Bamenda dimanche après les affrontements entre les manifestants et la police, selon une source médicale. Les «forces de sécurité ont dû recourir à des gaz lacrymogènes et parfois des coups pour disperser les manifestants».
Balles réelles
L’un des leaders du Front social-démocrate d’opposition (SDF), Joshua Osih, a déclaré à l’AFP que les forces de sécurité «tiraient à balles réelles sur les manifestants».
À Ndop, à 40 km de Bamenda, deux personnes ont été abattues, alors qu’une personne a été tuée à Kumbo en marge des protestations, a déclaré le maire de la ville, Donatus Njong.
Toujours à Kumbo, trois prisonniers ont été tués en essayant de s’échapper. Un jeune homme a été abattu par des forces de sécurité samedi dans la ville sud-ouest de Kumba, provoquant des affrontements entre les forces de sécurité et la population locale. L’incident a été confirmé par une source de sécurité et plusieurs résidents locaux contactés par téléphone.
Le président Paul Biya, âgé de 84 ans, a déclaré dimanche condamner «tous les actes de violence, peu importe d’où ils viennent ou qui sont responsables».
L’Union européenne a appelé tous les partis à être responsables et « respecter la règle de droit et éviter tout acte de violence« .
La crise provoquée par les manifestations, qui a été exacerbée au début de l’année 2017, lorsque l’accès à Internet a été coupé pendant trois mois, s’est intensifié ces dernières semaines avec la volonté de symboliser l’indépendance des régions anglophones.
Le 22 septembre, entre 30 et 80 000 personnes ont manifestées dans les régions anglophones du Cameroun, selon les estimations du International Crisis Group (ICG).
La déclaration symbolique de l’indépendance a été faite dimanche par Sisiku Ayuk, qui se présente comme le président d’Ambazonia : « Nous ne sommes plus des esclaves du Cameroun« , a-t-il déclaré. «Aujourd’hui, nous affirmons l’autonomie de notre patrimoine et de notre territoire».
Avant cette déclaration, les autorités camerounaises avait annoncé un arrêt temporaire des voyages et des réunions publiques dans la région du Sud-Ouest, ajoutant un couvre-feu dans la région voisine du Nord-Ouest, également anglophone.
L’accès à Internet est perturbée depuis vendredi, selon un journaliste de l’AFP, malgré les assurances du gouvernement selon lesquelles il n’y aurait pas de coupure d’accès dans les zones anglophones.
La majorité des 22 millions de personnes du Cameroun sont francophones, et près d’un cinquième sont des anglophones.
L’héritage remonte à 1961, lorsque l’ancienne entité britannique, le Cameroun méridional, s’est unie au Cameroun après son indépendance de la France en 1960.
La minorité anglophone se plaint depuis longtemps des disparités dans la répartition des richesses pétrolières du Cameroun.
Depuis novembre, la minorité anglophone proteste contre la discrimination perçue, en particulier dans l’éducation et le système judiciaire, où la langue et les traditions françaises lui sont imposées, même si l’anglais est l’une des deux langues officielles du pays.
La plupart des militants anglophones veulent que le pays reprenne un système fédéraliste – une approche qui a suivi l’unification de 1961, mais a été abandonnée plus tard en faveur d’un gouvernement centralisé dirigé par la capitale Yaoundé. Une minorité en difficulté appelle à la sécession.
Le président Biya s’oppose à ces changements.