Dylan Boutiflat, administrateur de la Fédération Léo Lagrange France (FLL), vient de participer à la Convention continentale Afrique-France à Douala. Celui qui est chargé du suivi des programmes d’éducation populaire européens et internationaux, notamment dans 10 pays d’Afrique, livre ses impressions à Afrik.com, au terme de cet évènement.
Entretien
Pouvez-vous nous faire une brève présentation de la Fédération Léo Lagrange France ?
Créée en 1960 en France, elle porte un projet associatif reconnu d’utilité publique et à but non lucratif. Autrement dit, elle affecte son résultat au développement de ses activités bénévoles et elle s’inscrit dans l’économie sociale et solidaire (ESS).
Quelles sont les missions de votre Mouvement ?
Avec près de 60 000 bénévoles, quelques 8 000 salariés et 500 collectivités locales partenaires, il propose des activités dans 3 champs : l’animation jeunesse, l’accueil de la petite enfance et la formation des adultes. Elles bénéficient à près d’un million d‘usagers.
Du 1er au 4 juin 2023, vous avez séjourné en terre camerounaise pour une Convention continentale Afrique-France. Pourquoi le choix du thème : « Etre connu et reconnu. Quelle représentativité des Fédérations africaines ? » Et comment se sont déroulés les travaux ?
Chaque année, nos 10 fédérations africaines se réunissent, avec la fédération internationale installée en France, pour faire le point sur leurs activités et discuter de nouveaux projets, en veillant à ce qu’ils répondent aux besoins des populations et aux urgences globales. L’an dernier, à Dakar, nous avions convenu de travailler jusqu’à la convention de Douala sur un diagnostic du dialogue civil. C’est-à-dire des relations entre les associations et les pouvoirs publics, dans le cadre démocratique de l’Etat de droit. Les travaux ont donc permis de partager analyses et propositions pour relayer les attentes de nos concitoyens et améliorer leur impact sur les politiques publiques, par exemple pour aider les enfants de la rue, sensibiliser les jeunes à la transition écologique, les mobiliser contre les discriminations, notamment les violences faites aux femmes.
Quels conseils, en tant qu’expert, pouvez-vous prodiguer aux jeunes Africains en particulier et du monde en général ?
J’ai confiance dans la capacité des jeunes à se faire entendre. Partout dans le monde, ils s’engagent pour combattre le réchauffement climatique, réduire les inégalités et dénoncer les injustices.
Nous avons sensibilisé nos administrateurs et directeurs au combat contre les féminicides et les fake news avec deux militants engagés
Notre fédération porte le nom de Léo Lagrange, ministre du Front populaire en 1936 qui a créé les congés payés, posé les bases d’une société du temps libre et des loisirs éducatifs. Il déclarait vouloir « ouvrir toutes les routes aux jeunes ». C’est plus que jamais notre message : avec les jeunes pour que le monde progresse.
Avez-vous atteint les objectifs que vous vous étiez fixés ?
Nous avons, encore une fois, beaucoup échangé sur nos pratiques alors que de nombreuses menaces pèsent sur nos pays : guerres, coups d’Etat, recul des libertés, hausse des inégalités, inflation des prix, crise climatique,… Nous avons sensibilisé nos administrateurs et directeurs au combat contre les féminicides et les fake news avec deux militants engagés.
Quel vœu émettez-vous à l’issue de cette rencontre de haut niveau ?
A Douala, je participais à la 8ème convention africaine de notre mouvement. Je me réjouis du chemin parcouru et de la qualité des projets réalisés. J’ai donc à cœur que les engagements pris continuent d’être tenus. C’est ce qui forge notre crédibilité, on le voit avec notre développement au Cameroun (l’aménagement de la bibliothèque d’Edéa 2 et du centre de loisirs d’Ekite), au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Sénégal ou au Sahel.
Comment entendez-vous porter les projets panafricains ?
Comme je vous le disais, pour les jeunes, je ne répondrai pas au nom de nos amis africains. Ils viennent d’ailleurs de relancer leur association Léo Lagrange Afrique pour mieux coordonner leur action sur le continent. Notre fédération mondiale inscrit sa coopération dans le cadre de conventions de partenariat avec chacune d’entre elles.
Comme en Europe, on constate dans de nombreux pays africains la tentation du repli identitaire, de la tentation raciste voire de la menace terroriste. Nous ne devons pas céder à cette culture de la peur et de la mort
Dans son manifeste adopté en 2019, lors de notre précédent congrès, notre mouvement affirme son attachement à la réciprocité de nos échanges. Notre déclaration de Dakar, en 2022, renouvelait notre souhait d’une coopération équitable entre africains et européens. Ainsi, nous tenons compte et répondons aux colères exprimées, notamment par de nombreux jeunes ici et là, contre des relations dépassées voire toxiques.
Que comptez-vous faire dans les prochaines années ?
Justement, d’ici le prochain congrès de la Fédération Léo Lagrange en 2024, nous débattons de notre plaidoyer « Jeunesses : le droit au bonheur ». Nos amis africains y prennent déjà toute leur place pour renouer le lien de confiance entre les jeunes et les adultes, entre les associations d’éducation populaire et les institutions démocratiques.
Quelle image gardez-vous du Cameroun, que vous avez visité en quelques jours ?
Je retiens la formule méritée d’un « pays miniature de l’Afrique », avec ses diverses cultures, langues, ethnies, géographies, … Comme en Europe, on constate dans de nombreux pays africains la tentation du repli identitaire, de la tentation raciste voire de la menace terroriste. Nous ne devons pas céder à cette culture de la peur et de la mort. Nous devons promouvoir une société riche du multiculturalisme et de l’ouverture au monde.
Un mot à l’endroit des délégués…
Ensemble, on est ensemble.