La fine fleur des humoristes camerounais, Valéry Ndongo et Ulrich Takam, étaient présents au jury de la première soirée de sélection de l’Académie d’Excellence de l’humour d’Abidjan, à l’Institut Français du Cameroun à Yaoundé, ce samedi 23 mars 2024, en clôture d’une semaine d’entraînement intensif organisée par l’équipe du Dycoco.
Née d’une inspiration de Grégoire Furrer, fondateur du Montreux Comedy Festival, l’Académie d’Excellence de l’humour africain à Abidjan, soutenue pour cette opération par le ministère français des Affaires étrangères, plante sa tente successivement dans les Instituts français de 5 pays du continent (Bénin, Cameroun, Gabon, Congo et Sénégal) pour y sélectionner l’un des boursiers de la prochaine saison. En plus, bien évidemment, de la Côte d’Ivoire sa terre d’attache.
La France en soutien du « stand up » en Afrique
Répondant à la volonté du Quai d’Orsay et de l’Élysée de marquer leur soutien à l’expression par l’humour et le « stand up » de la jeunesse africaine, cette initiative vient judicieusement compléter (sans le remplacer évidemment!) le travail de formation, d’accompagnement et de promotion réalisé dans de nombreux pays d’Afrique par « les anciens », les stars de l’humour qui font rire le continent depuis plusieurs décennies, et dont le rayonnement va souvent bien au-delà, entrainant de nombreuses vocations.
Sélection féroce des jeunes talents
Après une sélection préalable (plus de 40 candidats à Yaoundé, cette semaine) une dizaine de jeunes humoristes talentueux et talentueuses s’entraînent, pendant une semaine, de manière intensive, sous la direction du responsable pédagogique de l’Académie, Marius Arkangel, pour produire un gala d’humour au cours duquel un jury hautement éclairé et professionnel (à Yaoundé : Ulrich Takam G-Laurentine Assiga AF, Valery Ndongo Pro et Olivier Zegna Rata) désigne un lauréat unique, auquel sera proposé de rejoindre pour une saison, avec une bourse significative de 400 000 XOF mensuels environ, l’Académie du
Dycoco. Deux accessits sont décernés : un Prix Découverte. et un Prix de l’Originalité. Cerise sur le gâteau les candidats d’Abidjan eurent même droit à une session avec… Sophia Aram !
La qualité au rendez-vous : rires garantis
Une première conclusion s’imposait tout au long de la soirée pour les plus de deux cents spectateurs réunis dans la grande salle de spectacle de l’Institut français : tous les candidats et candidates étaient très doués. Autant de talents certainement, chacun exprimant avec puissance et énergie son tempérament et sa capacité à susciter l’hilarité. De Miki Hans, qui ouvrit le bal avec son sketch à la fois drôle et sensible, « Ma première fois », à l’énergique Félix Wazabanga et son sketch sur « Les Métiers », en passant par l’impétueux Freddy Markwin s’attaquant sans fléchir au sujet du Porno, ou par le volubile Jiz Miyo jouant facétieusement avec « L’oubli », ou encore par le génial Russel Kamhoua à l’appétit débordant et à « la vie » trop réussie pour être heureuse, sans oublier l’élégant et transgressif Bakayoko renversant franchement les codes en évoquant le charme parfait et supérieur des « Cougars »…
Les femmes ne manquaient pas à l’appel, avec Dao Dao Sony qui parvint à captiver la salle avec son analyse de l’hypnose, et bien évidemment Joyce Alade, Prix de l’Originalité avec sa parodie d’émission « 4 cadavres pour une tombe », exploitant librement les travers des tempéraments ivoiriens, congolais, sénégalais et camerounais, ses 4 veuves secouant de rire la salle.
Deux candidats se dégagent
Le jury comme la salle distinguèrent pourtant avant elle deux talents particulièrement drôles et efficaces au cours de ce gala de haut niveau : d’abord pour le Prix Découverte, Le Génie, avec son numéro sur « Le Respect » refusé aux hommes de petite taille… Expressif et lumineux dans son auto-dérision, acteur parfait dans l’évocation des situations gênantes ou choquantes vécues par les hommes de petite taille, Le Génie a déchaîné les applaudissements les plus nourris… Mais c’est sans aucune hésitation et à l’unanimité que le jury, par la bouche d’Olivier Zegna Rata, représentant du Montreux Comedy, décerna la palme à Carles Antonio alias Flentchou et à son sketch « le kongossa », tordante évocation des travers des racontars et des commentaires désobligeants d’hypocrites commères : en termes de maîtrise de la scène, d’interrelation avec le public, de jeu, d’assurance, d’interprétation comme d’écriture, de rythme et de justesse décalée, la performance était évidente.
Et c’est donc Flentchou qui récupère le gros lot : la possibilité de rejoindre, s’il le souhaite, la troupe des humoristes du Dycoco, à la rentrée 2024, et de parfaire son talent en profitant d’une bourse de professionnalisation d’une saison. D’où il reviendra encore plus aguerri et drôle, prêt pour une carrière internationale.
Du talent à revendre
Soirée de Rire à Yaoundé, donc, même s’il n’y avait qu’un seul gagnant et neuf, voire trente-neuf déçu(e)s… Une certitude cependant : largement formée à l’école du Valéry Ndongo Comedy Club, qui joue tous les vendredis soirs à Yaoundé, la jeune garde des humoristes camerounais a du talent à revendre. Tempérament, engagement, imagination, style, écriture, maitrise scénique, « autant d’humoristes, autant de personnalités à la fois attachantes et lumineusement drôles », pour reprendre les propres termes d’Olivier Zegna Rata interrogé après le gala, impatient de découvrir, dans les prochaines semaines, les talents gabonais, congolais ou sénégalais qui composeront demain l’aéropage varié des artistes lauréats-boursiers de l’Académie du Dycoco, à Abidjan.