Dans un discours inattendu de 30 minutes, le Président camerounais, Paul Biya, a annoncé mardi le 10 septembre 2019 à la télévision nationale, « un dialogue national », qui va étudier les doléances des populations anglophones des régions du Nord-Ouest et Sud-Ouest du Cameroun.
Le dialogue annoncé par Paul Biya à la fin de ce mois de septembre s’articulera autour des sujets suivants : le bilinguisme, la diversité culturelle et la cohésion sociale, la reconstruction et le développement des zones touchées par le conflit, le retour des réfugiés et des personnes déplacées, le système éducatif et judiciaire, la décentralisation et le développement local, la démobilisation et la réinsertion des ex-combattants, le rôle de la diaspora dans le développement du pays, etc.
« Toutes les forces vives du Cameroun », à savoir les maires, les députés, les associations, les autorités religieuses et traditionnelles, la diaspora camerounaise, etc., devront prendre part à ce dialogue national qui sera conduit par le Premier ministre camerounais, Joseph Dion Nguté, a annoncé Paul Biya.
La crise dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest a commencé par des revendications corporatistes portées par des avocats et des enseignants. Plus tard, ces revendications ont fait l’objet de récupération par des séparatistes et des groupes armés qui ont instauré des villes mortes : pas d’école, pas de service public, pas de commerce, etc.
Dans son discours, le président camerounais a mis en garde les sécessionnistes qui, après le dialogue national, vont continuer à « empêcher nos enfants à aller à l’école, piller nos biens, assassiner les forces de défense et de sécurité, brûler les écoles et kidnapper les citoyens ».
Cette prise de parole de Biya est hors de ses traditionnelles allocutions des 31 décembre et 10 février. La dernière fois que le Président camerounais s’est adressé à la Nation sur ce ton, c’était le 29 février 2008, lors des émeutes de la faim qui avaient coûté la vie à un grand nombre de Camerounais.
Les affrontements entre les groupes armés et les forces de défense font rage depuis lors. Selon l’ONG International Crisis, ces affrontements ont déjà causé la mort de près de 2000 personnes. Le haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés comptabilise 21 291 réfugiés camerounais au Nigeria du fait de cette crise et de centaines de milliers de déplacés internes.
Ce « grand dialogue national » n’est pas sans rappeler le « grand débat national » initié par le Président français Emmanuel Macron, début 2019, en réponse au mouvement de consultation des « gilets jaunes » qui a secoué la France.