Sous les rythmes de Ndawrabine, danse traditionnelle léboue, les 163 étudiants haïtiens ont foulé la terre sénégalaise hier aux environs de 17 heures. De l’aéroport au Monument de la renaissance africaine, ces jeunes gens ont été célébrés. Cahier d’un retour au pays…des ancêtres.
Sous les pieds du « Monument de la renaissance africaine », ils recommencent une nouvelle vie. Leurs inquiétudes se noient sur cette clameur populaire, cet accueil chaleureux. Ici se dessinent les contours de leur avenir. Une aube d’espoirs et d’espérance pour la race noire qui semble comprendre enfin que son sort est entre ses mains. L’histoire de ces jeunes haïtiens retient le souffle du continent noir. Et si l’on devait résumer ce beau spectacle, on dirait simplement qu’à Dakar, l’unité africaine a germé.
C’est aux environs de 17 heures que leur avion s’est posé sur le tarmac de l’aéroport Léopold Sédar Senghor. Un espace transformé en un vaste milieu folklorique le temps d’un accueil. Sous les rythmes du Ndawrabine, célèbre danse traditionnelle léboue, ils ont foulé le sol sénégalais. Ce sol qui, désormais, sera sien. L’aéroport de Dakar Yoff a refusé du monde hier. Déployées tout en harmonie, différentes troupes de danse ont rivalisé de performance. 15 heures, alors que le soleil pointe ses rayons impitoyables sur la terre, ces troupes se sont installées pour dérouler leur spectacle.
RéactionsJoseph Wilinx : « Je ne suis pas du tout dépaysé » « Je suis très content de cette cérémonie, c’est extraordinaire ! Nous remercions sincèrement le peuple sénégalais et le président Wade. Je ne suis pas du tout dépaysé, j’ai l’impression d’être toujours chez moi en Haïti. C’est beau ce qui nous arrive ici. » Jean Noël Sainte Louise : « Cet accueil de Dakar sera inoubliable » « J’ai le sentiment d’un retour à la terre des ancêtres, j’éprouve de la joie. Je suis très contente d’être ici. Une pensée pour mes amis, ma famille et mes proches restés au pays. Les événements du 12 janvier dernier ont plongé le pays dans un chaos total. Heureusement que le monde a été solidaire envers le peuple haïtien. Cet accueil de Dakar sera inoubliable. » Sara Shana Pierre Louis: « J’espère une nouvelle vie au Sénégal » « Je me sens vraiment fière d’avoir visité un autre pays d’Afrique : le Sénégal. Je suis contente de devoir vivre cinq années au Sénégal et d’y poursuivre mes études. C’est une chance d’avoir survécu au séisme et de venir recommencer une nouvelle vie au Sénégal. Nous n’avons pas d’inquiétude par rapport aux études, car nous avons été sensibilisés à cela. J’espère vraiment une nouvelle vie ici. » |
Après le salon d’honneur de l’aéroport, direction : le ‘Monument de la renaissance africaine’. L’ambiance atteint ici son paroxysme. L’Afrique est en fête ! ‘Un heureux coup du destin’, dira le professeur Iba Der Thiam très en verve sur ce présidium, entouré d’une foule qui se déchaîne sur des poses de voix et des phrases aux allures de poésie. Le link déjà établie à travers une brève révision de l’histoire qui lie les peuples haïtiens et sénégalais, le Pr Thiam s’éloigne sous les applaudissements pour laisser la place à Jacqueline Scott Lemoine, symbole vivant de l’intégration entre les deux pays. Jacqueline a fondu en larmes et fera couler beaucoup de larmes. Son discours poignant n’a laissé personne indifférent.
L’émotion échappe de cette voix portée par un corps svelte, en atteste ce discours chargé de termes doux. Etre accueilli au ‘Monument de la renaissance africaine’ est, selon le ministre haïtien de la Jeunesse, un symbole d’une Afrique debout, d’une Afrique qui lutte. Le crépuscule se pointe sous ses plus beaux habits en cet endroit rendu subitement magique par ces jeux de lumière provenant du monument de la renaissance et voici que le président de la Guinée-Bissau, Malam Bacaï Sanhia impose sa masse devant ce public composite. Malam porta haut sa voix de solidarité envers les étudiants au point où la réverbération s’empara avec insistance de cet endroit qui se reflète sur des miroirs magiques. Le Premier ministre du Niger saluera cet acte qui célèbre une Afrique unie, la fierté de tout un continent et de sa diaspora.
Plus le temps avance, plus cette douce brise de mer s’empare de la place. Le monument plus haut, plus coloré enfle son envol fier et plein d’espoir. L’espoir d’une Afrique qui prend sa revanche, ‘d’une Afrique qui a finalement gagné sur les forces du mal puériles’, s’exclame le président Abdoulaye Wade. De quoi soulever des cris populaires et des claquements de doigt chez les fanatiques.
De leur côté, les jeunes étudiants haïtiens, vêtus de blanc, casquette à l’effigie du drapeau haïtien, suivent avec attention ce discours. La fatigue se lit sur leurs visages innocents. Ce visage que l’on affiche souvent lorsque l’on débarque pour la première fois dans un endroit où l’on est désormais appelé à vivre. Le président Wade pour les rassurer leur dira : ‘Vos ancêtres étaient partis sous la force physique aveugle, aujourd’hui vous êtes revenus sous la force morale déterminée et inflexible.’ De quoi accrocher le sourire sur ces visages subitement illuminés. L’une des étudiants, Sara Shana Pierre Puis, confiera qu’elle se sent beaucoup plus à l’aise après cet accueil chaleureux et ces discours pleins de symboles.
Le célèbre maître de la parole, venu de Côte d’Ivoire, reprend du service pour saluer cette foule qui se disperse sous les lumières magiques de la famille la plus haut placée du Sénégal et qui culmine à 53 mètres de haut.