Premier voyage en Europe de Pierre Buyoya après le parachèvement des accords d’Arusha. Fort de la mise en place d’un gouvernement d’union nationale au Burundi, le président se veut confiant et espère que les investissements suivront.
Pierre Buyoya, président du Burundi, parle posément. Cette apparence sereine contraste avec la situation critique que connaît son pays, aux prises avec la guerre civile depuis 1993. Il se veut l’artisan de la paix, le leader confiant d’un pays en voie de reconstruction. Une vitrine qui semble plaire aux bailleurs de fonds, interlocuteurs indispensables d’un Burundi au bord de la banqueroute. Interview.
Afrik : Monsieur le président, qu’en est-il des accords d’Arusha ?
Pierre Buyoya : Nous entrons à présent dans la phase finale, dans la mise en application des accords de paix. Les Burundais, représentés par 17 partis, dont 3 factions armées, ont pris part aux négociations qui ont abouti à ces accords. La mise en place d’un gouvernement d’union nationale, dans lequel les différentes ethnies sont représentées à part égales, est un grand pas. Un calendrier a été fixé : dans 18 mois auront lieu les élections locales, dans 24 mois les élections législatives et enfin, dans 3 ans, les élections présidentielles. Nous nous acheminons aussi vers un règlement étatique des » contentieux du passé « , via la création d’une commission » Vérité et réconciliation » et, à terme, d’un Tribunal Pénal International au Burundi.
Afrik : Quels sont les prochaines épreuves que le Burundi doit surmonter pour sortir de la crise ?
Pierre Buyoya : Le premier problème est évidemment la violence des factions qui n’ont pas déposé les armes. Mais leurs revendications sont d’abord politiques et nous leur proposons une réponse politique. A terme, ces groupes devraient être intégrés à l’armée régulière qui sera composée à 50% de Hutus et à 50% de Tutsis. Les exactions seront punies par les autorités internationales, après examen de la situation afin de déterminer s’il y a eu ou non un génocide au Burundi. Le second point est d’ordre économique. A la conférence qui s’est tenue ce week-end à Genève, plusieurs pays occidentaux et la Banque mondiale se sont engagés à verser 835 millions de dollars afin de financer notre programme de développement.
Afrik : Le président Mandela s’est imposé comme médiateur du conflit. En êtes-vous satisfait ?
Pierre Buyoya : Nous voulions un personnage d’envergure internationale pour superviser le règlement du conflit. C’est nous qui avons requis son arbitrage. Cela ne signifie pas que l’Afrique du Sud prenne sous sa coupe notre pays. Les forces armées sud-africaines disposent d’à peine 1 000 hommes sur place.
Afrik : Une question personnelle : quel sera votre avenir politique après votre départ dans 18 mois ?
Pierre Buyoya : Je ne m’accrocherai pas au pouvoir. La démocratisation de l’Afrique est un processus bien amorcé, qu’il faut continuer. La nouvelle constitution prévoit également que je serai inéligible aux postes de vice-président et de Premier ministre.