L’une des réformes phares de cette rentrée burkinabée demeure la gratuité
des manuels scolaires. Une manière pour le nouveau gouvernement de Tertius Zongo de démontrer son attachement à l’éducation comme l’un des remèdes à la pauvreté et d’entrer de plain-pied dans l’action avec ce projet audacieux.
Par René Ga
Le concept est simple : un élève, un manuel. De retour de vacances
estivales, le Premier ministre a donné, le lundi 27 août dans l’Est du pays,
le coup d’envoi officiel de la campagne nationale de distribution gratuite
de livres scolaire. Au cours d’une cérémonie officielle, Tertius Zongo a
remis en main propre un lot de manuels au gouverneur de la région de l’Est
Kilimité Théodore Hien. Une transaction symbolique réalisée dans une
ambiance à la fois festive et solennelle.
Le processus est donc lancé depuis le début de la semaine, en amont de la
rentrée scolaire à venir. Près de 3 500 000 ouvrages seront distillés dans
les écoles publiques et privées du territoire et ce n’est pas tout. En sus,
des livres-guides destinés aux enseignants sont également au programme. Coût total de l’opération : 1 500 000 000 FCFA, soit 2 286 585 euros [[1 euro = 656 francs CFA]]. « L’éducation n’a pas de prix », martèle dans les tribunes officielles et dans la presse le chef du gouvernement. Endiguer la pauvreté endémique à coup de craie et de tableau vert, tel est le leitmotiv de cette réforme.
La corruption des fontionnaires menace l’opération
Toutefois, dans l’opinion publique souffle un vent de scepticisme. Nombreux
sont ceux qui présagent des détournements en série par des fonctionnaires sans scrupules. « Comme la corruption n’est pas punie, cela continue en toute impunité et des livres finiront sur les étages de libraires qui les vendront au prix fort », redoute Tahirou Traoré, secrétaire général du syndicat national des travailleurs de l’éducation nationale (SYNTEB). Pour
lui, la gratuité des manuels constitue un voile qui occulte la myriade de
tracas à affronter par les enseignants. Comme la cotisation des parents
d’élèves indispensable au bon fonctionnement de l’école, payée à contrecoeur
par les parents qui le peuvent. Variant de 1 000 à 8 000 FCFA par an, elle ne suffit pas à couvrir les frais d’entretien et le
matériel des professeurs.
Si la distribution des manuels a bel et bien commencé, elle est loin d’avoir
fini. Une bonne partie des élèves du pays recevra les manuels d’ici
avril-mai, soit en fin d’année scolaire… Si l’initiative fait des émules,
beaucoup, au sein de l’enseignement, portent un regard critique sur la
réforme. Renvoyant ainsi au tableau le gouvernement qui semble ne pas avoir assez révisé les besoins vitaux des écoles.