Le Burkina Faso a officiellement lancé, vendredi dernier, son Projet d’urgence de lutte contre le criquet pèlerin en Afrique. Cette initiative a pour objectif de contrôler et d’éradiquer les acridiens qui ne laissent que les tiges des cultures après leur passage. Soutenue par un crédit de la Banque mondiale, elle concerne plusieurs autres pays à risque.
Plan d’attaque contre le péril acridien. C’est l’objectif que s’est fixé le Burkina Faso en inaugurant son Projet d’urgence de lutte contre le criquet pèlerin en Afrique (Pulcpa), initiative qui doit être lancée dans d’autres pays à risque. Une mesure nécessaire, voire indispensable, pour éviter au « Pays des hommes intègres » les terribles ravages qui ont frappé en 2004 l’Afrique de l’Ouest et une partie de l’Afrique Centrale et de l’Est. Cette année-là, le Burkina Faso n’avait pas échappé à cette invasion sauvage et massive. Il avait en effet été lourdement touché dans les provinces sahéliennes de Soum, Oudalan, Seno, Yagha, Sanmatenga, Namentenga et Lorum, situées dans le Nord. Autant de zones où la famine a frappé à la porte de nombreux Burkinabès, qui n’arrivaient pas à joindre les deux bouts à cause des criquets, mais aussi de la sécheresse.
Pour combattre les invasions, le pays a bénéficié, en septembre dernier, comme d’autres pays [[La Gambie (0,9 million de dollars), le Mali (1,9 million de dollars), la Mauritanie (2 millions de dollars), le Niger (2 millions de dollars), le Sénégal (2 millions de dollars), et le Tchad (2,1 million de dollars]]), de l’aide de la Banque mondiale. Elle lui a accordé un prêt de 1,6 million de dollars (environ 854 millions de FCFA). Une somme qui constituait une avance sur le crédit [[La Banque mondiale explique que les autres pays bénéficiant d’un crédit sont la Gambie (1.9 million de dollars), le Mali (10,1 millions de dollars), la Mauritanie (10,6 millions de dollars), le Niger (9,9 millions de dollars), le Sénégal (10 millions de dollars) et le Tchad (1 million de dollars)]] de 8,4 millions de dollars (environ 4.5 milliards de FCFA) que l’organisme international avait décidé d’allouer, pour quatre ans, au Burkina Faso pour la mise en place de son Projet d’urgence de lutte contre le criquet pèlerin en Afrique.
Un plan d’action béton
Le lancement officiel du Pulcpa a eu lieu le lendemain de la clôture d’un atelier d’information, qui s’est tenu du 17 au 18 août derniers, où plusieurs acteurs de la lutte antiacridienne étaient présents. Objectif : « Contrôler et éradiquer les infectations dues aux criquets pèlerin, en vue de contribuer à l’accroissement des productions agro-pastorales et ainsi assurer la sécurité alimentaire », indique Mamoudou Nacambo, de la cellule communication du ministère de l’Agriculture de l’Hydraulique et des Ressources Halieutiques (MAHRH). Pour parvenir à ce résultat, le pays va appliquer un plan se déclinant en quatre points. « La phase A concerne la mise en œuvre de mesures d’urgence et l’organisation des campagnes de lutte antiacridienne. La phase B concerne la restauration des productions agro-pastorales et l’assistance en matière de sécurité alimentaire. La phase C concerne le renforcement des systèmes nationaux et régionaux de surveillance et d’alerte de réaction précoce. La phase D concerne la gestion et le suivi d’évaluation », énumère Mamoudou Nacambo.
Pour le volet B, il explique « que, dans les zones touchées, le gouvernement va aider les populations. Il financera les groupements qui auront des microprojets, dont le coût n’excédera pas 3 000 dollars (environ 1,6 million de FCFA). Ce sont les comités villageois qui éliront les meilleurs projets et qui les transmettront aux autorités. A partir du mois d’octobre l’argent sera donné aux paysans, qui ne devront pas le rembourser. En revanche, ils devront participer, en argent ou en nature, à hauteur de 20% du coût du projet », poursuit le responsable. Quant à la phase de « renforcement des systèmes nationaux et régionaux de surveillance et d’alerte de réaction précoce », il s’agira de veiller à l’évolution de la situation acridienne aux frontières. « Des équipes sont mises en place aux frontières avec le Mali et le Niger, pays où les invasions sont les plus importantes et d’où les criquets arrivent chez nous. Ce cordon signalera toute action et la transmettra au comité national », précise Mamoudou Nacambo.
Des armes chimiques, mais pas seulement
Ces « policiers antiacridiens » seront notamment équipés de véhicules et de pesticides. Apparemment, les produits prévus ne seraient pas dangereux pour l’environnement. « Une étude a été faite sur l’impact environnemental des produits. Ceux qui y ont participé ont révélé qu’ils ne présentaient aucun danger », rapporte Mamoudou Nacambo. La lutte contre les criquets ne devrait d’ailleurs pas uniquement se jouer avec des armes chimiques. « Le projet va se charger de sensibiliser les populations aux méthodes alternatives de lutte contre les criquets pèlerins », explique Mamadou Coulibaly, coordinateur du projet, dont les propos ont été rapportés par Xinhua.
Si tout se passe bien, le scénario catastrophe de 2004 ne pourra pas se reproduire. Un rapport des attaques acridiennes de l’an passé du MAHRH rappelle le triste bilan. « Les personnes affectées sont estimées à 491 056 individus. (…) Les superficies infectées s’élèvent à 111 477 ha (hectares, ndlr) dont 62 673 ha sur cultures. Les traitements ont couvert 24 865 ha soit 22,30% des superficies infectées. La quantité des pesticides utilisée s’élève à 23 339 litres. » Une opération qui a coûté cher. Xinhua indique en effet que le gouvernement a déboursé plus de 800 millions de FCFA (environ 1,5 million de dollars), sans compter le 1,2 milliard de FCFA (environ 2,3 millions de dollars) pour acquérir un aéronef devant soutenir les efforts de lutte. Au MAHRH, on ne dors que d’un œil : pas de signe d’invasion pour le moment, mais les autorités veillent.