Estimant la carte électorale non conforme à la loi électorale, le candidat Bénéwendé Sankara a refusé de voter dimanche pour le premier tour de la présidentielle burkinabè. Il exige l’annulation du scrutin alors que les premières tendances placent, sans surprise, Blaise Compaoré en tête du scrutin qui n’a pas mobilisé grand foule.
De notre correspondant
Coup de théâtre. Lors du premier tour de la présidentielle burkinabè tenu dimanche 21 novembre, Me Bénéwendé Sankara, candidat à l’élection, a refusé de voter. Estimant la carte électorale non conforme aux prescriptions de l’article 53 du code électoral, le chef de file de l’opposition burkinabè s’est abstenu. Aujourd’hui, à Ouagadougou, le porte-étendard de la Coalition de l’Intégrité, a exigé l’annulation du scrutin. « J’estime qu’aucun candidat ne peut accepter de se faire élire sur la base de la violation d’un texte légal. On est chef d’Etat pourquoi ? C’est pour faire voter des lois et les faire appliquer. Si dans ce pays on peut voter des lois et les mettre de côté, c’est qu’il y a un problème. On ne peut pas élire le président du Faso en violant la loi», a-t-il déclaré au quotidien L’Observateur Paalga dans sa parution du jour.
L’article 53 du code électoral stipule que soient mentionnés sur les cartes d’électeur, entre autres, la date et le lieu de naissance. Or, sur les cartes délivrées par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), il ne figure que l’année de naissance. La date et le lieu de naissance n’y sont pas du tout inscrites. Cette revendication de l’opposition ne surprend pas. À la veille du scrutin, Mousbila Sankara, rapporteur de la CENI au titre de l’opposition, avait déjà annoncé la couleur en démissionnant de son poste pour, disait-il, « ne pas être complice et comptable de la forfaiture relative à la confection des cartes d’électeurs ». Du reste, sa démission venait en écho à l’action judiciaire engagée le 18 novembre par cinq candidats à l’élection présidentielle. À l’époque, Hama Arba Diallo, Boukari Kaboré dit le Lion, François O. Kaboré, Emile Paré et Bénéwendé Sankara, portaient plainte auprès du Conseil Constitutionnel, pour la non-conformité des cartes d’électeurs du scrutin présidentiel.
Sous le feu de la critique
Régulièrement pris à parti par Me Sankara, le président de la CENI n’a pas tardé à réagir. Sur les antennes de la radiodiffusion du Burkina, Moussa Michel Tapsoba, a qualifié l’attitude de Me Sankara de « mépris pour ses électeurs et pour le peuple burkinabè ». Le chef de file de l’opposition burkinabè n’est pas non plus épargné par le parti au pouvoir. Salifou Sawadogo, Secrétaire chargé des jeunes du Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP), a enfoncé le clou. « Me Sankara fait du cinéma et c’est dommage ! Il est mauvais perdant et cherche des subterfuges» a-t-il assené sur les ondes de Radio Burkina.
Me Sankara ne s’est pas aliéné que les seuls politiques. L’incompréhension et la colère ont touché jusqu’à l’électorat. « Me Sankara se fout des masses populaires. Il ne fallait pas qu’il batte campagne. Pendant que nous travaillons à faire voter des gens pour lui, il vient avec ces histoires de tribunal pour nous embrouiller. J’ai passé tout mon temps à convaincre des gens pour qu’il vote pour lui et il nous annonce en grande pompe qu’il n’a pas voté. Il devra rembourser les 28 millions. Ils sont tous complices du système. Et après ils se plaignent de l’indifférence des gens. J’aurais dû voter pour un autre», s’offusque Jacks, un internaute sur le forum du lefaso.net. « Bénéwendé s’est empli les poches avec la subvention publique payée par nos impôts et refuse de voter son prétexte que la carte n’est pas conforme à la loi. Est-ce le jour du scrutin qu’il a constaté ces erreurs ? Il nous a insultés tous », enfonce pour sa part Haoua Ouattara, une psychologue.
En attendant le verdict de la Cour Constitutionnelle, Bénéwendé Sankara et les autres candidats à l’origine de la plainte, tiennent mardi 23 novembre une conférence de presse à Ouagadougou pour donner leur position sur le scrutin dont les premières tendances placent, sans surprise, Blaise Compaoré en tête. Deuxième au scrutin de 2005, Me Bénéwendé Sankara risque de perdre son rang au profit de Hama Arba Diallo. La bataille fratricide des sankaristes est l’une des curiosités de cette élection jouée d’avance.
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