Le Premier ministre marocain, Abdelilah Benkirane a remis en cause la décision prise par le précédent gouvernement portant sur l’intégration directe à la fonction publique de 4 000 diplômés-chômeurs. Une bataille tendue s’annonce entre les deux parties.
Inconstitutionnelle ! Telle serait la décision prise en 2011 par l’ex-Premier ministre, Abbas El Fassi, d’intégrer à la fonction publique près de 4 000 diplômés-chômeurs sans passer par les voies d’usage. Du moins, c’est l’avis de l’actuel gouvernement d’Abdelilah Benkirane qui estime qu’il n’est pas possible de concrétiser cette mesure : « l’intégration directe n’est pas possible du point de vue légal du fait que la constitution dispose clairement dans son article 31 que le gouvernement s’engage à assurer l’égalité entre les citoyens dans l’accès à la fonction publique selon le mérite », a précisé jeudi le ministre de la Communication, Mustapha El Khalfi.
Le 20 juillet 2011, sous la pression du Mouvement du 20 février, l’ancien Premier ministre, Abbas El Fassi avait pris la décision d’offrir à environ 4 000 diplômés-chômeurs en colère des postes dans la fonction publique, et ce, sans passer le moindre concours ou entretien d’embauche.
Du changement dans l’air…
Avec sa récente arrivée au pouvoir, Abdelilah Benkirane avait dès le mois de février annoncé la couleur. Alors qu’il prenait part aux travaux du forum économique mondial à Davos, en Suisse, le chef du gouvernement avait expliqué que l’embauche dans la fonction publique devait se faire de manière méritée et équitable. Il a promis aux diplômés-chômeurs un « encadrement étatique pour des développements personnalisés sur la voie, entre autre, de l’auto-embauche », rapporte le quotidien électronique Emarrakech. Cette nouvelle orientation a été décidée jeudi lors du conseil hebdomadaire du gouvernement. Benkirane a alors soumis le procès verbal du 20 juillet au secrétariat général du gouvernement pour une analyse constitutionnelle.
Mohamed Amine Sekkal, coordinateur général de la Coordination nationale des diplômés-chômeurs, une des quatre fédérations de chômeurs signataires du procès verbal du 20 Juillet, a vivement réagi aux propos de Benkirane. « Le PV du 20 juillet a été signé alors que le décret ministériel d’avril 2011 prévoyant l’intégration directe des diplômés-chômeurs était toujours en vigueur », a-t-il déclaré à la sortie jeudi du Conseil des ministres, avant d’ajouter que « les coordinations concernées sont déterminées à poursuivre leur combat, à manifester pacifiquement et à s’en remettre à la loi pour faire prévaloir leurs revendications légitimes portant sur l’embauche directe ».
La décision de Benkirane intervient alors que plusieurs régions du royaume s’enflamment pour demander davantage de justice sociale, à l’exemple du Rif (au nord) ou de Taza (au nord-est). Qui plus est, le ministre des Affaires générales et de la Gouvernance, Najib Boulif, a déclaré qu’il y aurait plus de 90 000 emplois fictifs dans la fonction publique, soit un budget annuel de 2,3 milliards de dirhams (2,6 millions d’euros). De quoi en énerver plus de quatre mille.
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