Un spectacle comique et décapant qui raconte l’histoire de Bougouniéré. Une bonne malienne et mère célibataire qui, ayant fait fortune en France, revient à Bamako et retrouve sa fille autrefois confiée à un griot traditionnel et fiancée à un rappeur passionné.
C’est le griot Kotéfa qui raconte. Bougouniéré est une bonne bamakoise. Une mère célibataire aussi. Mais après avoir épousé son patron qui finit par la répudier, elle décide de suivre » une madame de ONG » et émigre en France. Sans oublier de confier sa fille Fatou à Djéliba, un ami griot totalement épris d’elle. Bougouniéré découvre l’eau courante et s’exclame » ah ! vraiment, le blanc a travaillé « , s’indigne du comportement peu respectueux des enfants envers les adultes et s’étonne de voir à Barbès » les Noirs courir comme des fourmis « . Et voilà qu’un jour, elle gagne au Millionnaire !
Décalages
Bougouniéré décide donc de rentrer à Bamako pour y construire un studio de production. On la voit à l’aéroport, avec » le bagage luxueux et l’habit de classe « . En fait un cadi plein à ras bord et un tailleur trop voyant. Le mauvais goût et la prétention des nouveaux riches. Mais Bougouniéré est touchante et très drôle dans ce rôle de femme qui humilie à son tour pour se venger de ce qu’elle a vécu. Surtout lorsqu’elle réplique au douanier qui veut lui faire payer l’excédent » d’accord je paye et je te laisse en plus ma carte orange comme ça tu ne sauteras plus les barrières « .
Bougouniéré trouve que Bamako a beaucoup changé alors que ceux qui y sont restés lui disent » la vie, c’est comme tu l’as laissée « . Fatou a grandi et se cherche. Elle se demande qui est son père et pourquoi sa mère l’a abandonné. Elle reproche à Bougouniéré de l’avoir laissée se faire exploiter par Djéliba. Elle se console avec Kini, un fou de rap qui chante à longueur de journée » la corruption/la mondialisation/les fausses élections/ça pue « . Djeliba quant à lui s’avère être un griot de seconde zone qui s’entête à défendre les traditions, un magouilleur hors pair mais toujours aussi amoureux de Bougouniéré.
Classique revu et corrigé
Le Retour de Bougouniéré, en plus d’être une pièce où l’on ne cesse de rire, est une satire de la société malienne qui souffre de trois vices » le parasitisme social, la paresse aggravée et l’hypocrisie majeure « . C’est par ces deux aspects qu’elle appartient au genre du Kotéba, forme d’art dramatique propre à l’Afrique de l’Ouest. Mais cette pièce appartient aussi au genre du Maana en ce qu’elle est un récit donné en public et en musique par un griot. L’Atelier de Bamako, qui joue le spectacle avec la Compagnie de l’Etoile Peinte, regroupe au Mali des artistes qui croient en la capacité de l’Afrique à concourir au renouvellement de l’art théâtral. Avec Le Retour de Bougouniéré, et la reprise du personnage classique du répertoire malien, cultures ancienne et contemporaine se mêlent. Avec brio.
Le Retour de Bougouniéré a été présenté dans le cadre des Rencontres 2001 au Théâtre International de Langue Française (Paris) du 7 au 11 novembre.