Le gouvernement du Malawi est sur le point d’introduire un ensemble de lois censées rendre la vie de ses citoyens plus agréable. Interdiction de péter en public, de dire la bonne aventure, de se battre en public… les autorités malawites ne laisseront plus rien passer.
Aucun pays ne veut que ses citoyens soient au ralenti, discourtois, désordonnés, ou que des ivrognes causent des nuisances dans la sphère publique. Partant de ce principe, le Malawi serait sur le point de rendre un ensemble de comportements punissables par la loi. L’administration du président Bingu wa Mutharika projette, afin de « façonner des citoyens responsables et disciplinés », d’introduire une série de lois qui criminaliseraient une pratique naturelle, un événement sonore et olfactif quotidien : « péter », « faire un vent », « lâcher une caisse ». Ce projet de loi datant de 2010 doit, selon la presse malawite, être présenté lors de la prochaine session parlementaire par le ministre de la Justice, George Chaponda.
Le projet gouvernemental a été diversement accueilli par les citoyens malawites. « Comment ce gouvernement peut-il criminaliser la libération de gaz intestinaux ? Tout le monde fait ça… En public ou avec un son d’accompagnement désagréable… En faire un crime, c’est faire de la démocratie une farce », réagit l’un d’entre eux. Un autre déclare qu’il « soutient ce projet bienvenu. Parfois, les vents en public ou lors de rencontres sont une atteinte à la paix sociale». Une position que partage un député dont les propos sont repris par Talkafrique. Sa motivation ? Une triste expérience : « Un jour, il y a quelques années, avant de rentrer dans la fonction publique, se rappelle-t-il, j’étais en retard pour une réunion avec mon patron et nous avons décidé d’utiliser l’ascenseur. Dans l’ascenseur, nous avons rencontré un monsieur qui n’a même pas ouvert les yeux pour dire « salut », mais qui par contre a lâché une « bombe ». Elle était si âcre qu’elle nous a laissés à bout de souffle ! Je crois que cette loi permettra de réduire ces attentats publics. »
Le projet de loi du gouvernement malawite ne s’arrête pas aux flatulences et à leurs nauséabonds effets. Il vise également à punir toute personne portant atteinte à des assemblées religieuses, violant des lieux de sépulture ou entravant des inhumations, les atteintes à la pudeur contre les femmes, les combats sur la place publique et le port d’armes offensives sans autorisation légale. Il pénalise aussi les personnes qui prétendent être des diseurs de bonne aventure, ainsi que plusieurs autres actes jugés répréhensibles.
John Tembo, chef de file de l’opposition du pays d’Afrique australe, a accueilli froidement l’initiative gouvernementale. «L’établissement d’une justice de pacotille n’est pas idéal dans une démocratie (…) Le peuple de ce pays ne peut équitablement apprécier l’intégrité de cette proposition », a-t-il déclaré. Un commentaire qui fait écho à d’autres critiques émises dans le pays, questionnant en particulier la capacité de la justice malawite à répondre au surcroît de plaintes que générerait l’adoption du projet de loi.
Par Kabelo Marupi