Bénin : les avocats de Reckya Madougou s’insurgent contre l’interdiction de visite à leur cliente


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Reckya Madougou
Reckya Madougou

Les avocats de l’opposante béninoise Reckya Madougou purgeant une peine de 20 ans d’emprisonnement ont publié un communiqué de protestation, ce vendredi. Motif : ils s’insurgent contre l’interdiction de visite à leur cliente.

Dimanche dernier, 5 février 2023, les députés élus du parti d’opposition, Les Démocrates, ont rendu une « visite de courtoisie » à Reckya Madougou détenue à la prison civile d’Akpro-Missérété, à quelques encablures de la capitale, Porto-Novo. Trois jours plus tard, ils ont voulu mener la même démarche vis-à-vis de l’autre opposant détenu à Cotonou, Joël Aïvo. Mais là, ils se sont heurtés à un refus. Les responsables du centre carcéral leur ont opposé un décret de 1973, le décret n°73-293 du 15 septembre 1973 portant régime pénitentiaire. Ce dernier fait obligation à toute personne voulant visiter un détenu d’exhiber un permis de visite.

Le mercredi 8 février 2023, deux responsables du parti Les Démocrates, le vice-président et député élu, Nourénou Atchadé et l’ancien ministre Alassane Tigri ont voulu rendre visite une nouvelle fois à Reckya Madougou. Cette fois-ci, le décret de 1973 a été brandi pour rejeter leur requête. Conséquence : le collectif des avocats de Reckya Madougou monte au créneau et proteste.

« Le collectif des avocats de la Présidente Reckya Madougou, arbitrairement détenue, dénonce et condamne cet énième acharnement qui ne vise qu’à l’empêcher de continuer à exercer ses droits civils et politiques », lit-on dans le communiqué. Pour les avocats, la raison évoquée par les autorités pénitentiaires ne se base sur aucun fondement solide. Et pour cause ! « Non seulement ledit décret est tombé en désuétude, mais en plus il tire son fondement de textes législatifs abrogés ou devenus caducs de sorte qu’il ne saurait donc produire quelque effet de droit », soutiennent-ils.

Un « fallacieux prétexte »

Et de rappeler l’Avis numéro 51/2022 du GTDA/ONU qui avait demandé la libération sans condition de l’opposante. Selon le communiqué, « chaque jour qui passe ne fait qu’empirer la situation des auteurs à divers niveaux de la chaîne pénale de cette détention que les Nations Unies ont, dans leur avis contradictoire, jugée triplement arbitraire ».

Pour les avocats, il n’y a pas de doute que des motivations politiques sous-tendent cette attitude des autorités pénitentiaires : « Le fallacieux prétexte du permis de visite avancé aujourd’hui pour refuser désormais et de nouveau à la Présidente Reckya Madougou toute visite de ses proches (en dehors de sa mère de 73 ans) n’est qu’une confirmation surabondante que sa détention ne relève que de motivations strictement politiques ».

Ceci d’autant plus que « pendant ce temps et dans toutes les prisons du Bénin, tous les autres détenus recevaient et continuent de recevoir des délégations de leurs collègues ou amis et sans production de permis spécial de visite », martèle le communiqué. Les avocats n’attendent autre chose que la libération pure et simple de leur cliente et la prise de sanctions contre toutes les personnes ayant joué un rôle dans sa « détention arbitraire ».

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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