Créée en 2005, la Fondation Zinsou pour l’art contemporain africain fête ses 10 ans à Cotonou, la capitale économique du Bénin. L’artiste béninois Romuald Hazoumé est à nouveau exposé pour l’occasion. « On s’était donné rendez-vous dans 10 ans », explique, amusée, Marie-Cécile Zinsou, la présidente de cette fondation.
A Cotonou,
A l’occasion des 10 ans de la création de la Fondation Zinsou pour l’art contemporain africain, l’artiste béninois Romuald Hazoumé est à l’honneur dans la salle d’exposition du siège de la Fondation. Elle est située dans le quartier de Cadjehoun, à Cotonou, la capitale économique du Bénin.
Créée avec les moyens de la famille Zinsou, notamment du père de la présidente, Lionel Zinsou, récemment nommé Premier ministre du Bénin, cette fondation permet de rendre la culture accessible à toute la population, notamment l’art contemporain. Elle a été créée, en juin 2005, par Marie-Cécile Zinsou qui n’a alors que 21 ans.
Romuald Hazoumé
Après avoir découvert le travail de Romuald Hazoumé, dans une galerie d’Allemagne, elle lui propose de collaborer à son projet. Elle lui donne ainsi la possibilité d’exposer ses œuvres dans son pays. Alors qu’il n’était pas connu au Bénin qu’il avait dû commencer à voyager à l’étranger pour pouvoir vivre de son travail. Il devient le premier artiste à être exposé par la Fondation Zinsou.
Le dépositaire des cultures et des traditions
Cette exposition-anniversaire consacre le retour de Romuald Hazoumé dans cette salle d’exposition, 10 ans après. Il a accompagné la Fondation depuis sa création, prodiguant conseils et remarques jusqu’à aujourd’hui.
« Aré », le nom de l’exposition, est un mot Yoruba, une ethnie présente notamment au Nigeria et au Bénin, qui désigne celui qui était dépositaire des cultures et des traditions dans le royaume et qui les transmettait en formant d’autres « Aré ». Elle est empreinte d’un message politique fort qui caractérise le travail de Romuald Hazoumé.
« Pantalonnade » de Romuald Hazoumé qui symbolise l’affaire Talon (Crédit photo: Frédéric Schneider)
La première œuvre exposée donne le ton : « Pantalonnade ». A l’aide d’un masque en bidon, le matériel qu’il utilise le plus et qui l’a rendu célèbre, il a voulu symboliser « l’affaire Talon », du nom du richissime homme d’affaire, ancien financier de Boni Yayi, qui a finalement été accusé d’avoir voulu l’empoisonner, en 2012. Des talons de chaussure sont visibles sur le masque.
« Mongouv.com » de Romuald Hazoumé (Crédit photo: Frédéric Schneider)
Une deuxième œuvre intitulée « Mongouv.com » fait uniquement d’assemblage de bidons, veut montrer le peuple menaçant et imposant qui regarde le gouvernement isolé pour dénoncer la gabegie qui règne au sein de la politique au Bénin.
Une autre œuvre encore intitulée « TranshumEnts » dénonce la « transhumance » au sein de l’Assemblée nationale au Bénin. Ce phénomène désigne les changements de partis de certains députés en cours de mandat, en fonction des élections, alimentés par la circulation de sommes importantes d’argent.
« TranshumEnts », de Romuald Hazoumé (Crédit photo: Frédéric Schneider)
« L’art dit la vérité. C’est une partie de nous qu’on expose. Si on n’a rien à dire, on n’a rien à faire dans ce milieu-là », justifie Romuald Hazoumé[[Interview de Romuald Hazoumé qu’il accorde à RFI. Url: qui s’insurge contre la vision occidentale d’un continent pauvre. « L’art peut être source de développement. (…) Il faudrait que les politiques africains s’en rendent réellement compte, que leur culture soit la première source de développement pour leur peuple. », affirme-t-il.
Wakpon, le musée fait le mur
« C’était une évidence pour nous », explique Marie-Cécile Zinsou, au sujet de cette exposition anniversaire. En 10 ans, la Fondation a mis en œuvre quantité de projets. En plus d’un lieu d’exposition à Cotonou, elle a ouvert un des premiers musées d’art contemporain d’Afrique de l’Ouest à Ouidah. Près de six mini-bibliothèques pour les enfants ont été créées dans la capitale économique béninoise. Des programmes visant à rendre l’accès à certains musées du pays gratuits ont été mis en place. Des partenariats ont été signés avec près de 300 écoles afin de faciliter l’acheminement des enfants vers des lieux d’expositions à l’aide d’un bus acquis par la Fondation, en 2009.
« Osa Nla » de Romuald Hazoumé, du nom des des Dieux majeurs chez les Yorubas (Crédit photo: Frédéric Schneider)
La présidente de la Fondation ne compte pas s’arrêter là. Elle veut trouver le moyen de restaurer certains bâtiments du patrimoine béninois pour en faire des lieux d’expositions, comme cela a été fait à Ouidah : le musée Zinsou a été ouvert dans la Villa Adjavon de style afro-brésilien, héritage de l’histoire coloniale du Bénin. Marie-Cécile Zinsou veut aussi faire des nouvelles technologies africaines un des nouveaux axes de recherche de sa Fondation. Parallèlement à la nouvelle exposition, elle a dévoilé au public une nouvelle application inédite qui permet d’avoir accès aux œuvres du musée depuis un smartphone ou une tablette.