Bénin : la Cour condamne le bâtonnier pour entrave au droit à un procès équitable


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Justice (illustration)
Justice (illustration)

La Cour constitutionnelle du Bénin a reconnu le bâtonnier coupable de violation du droit à un procès équitable en refusant de commissionner des avocats d’office.

La Cour constitutionnelle du Bénin a tranché. Dans une décision rendue le 30 janvier 2025, elle a reconnu le bâtonnier de l’Ordre des avocats coupable de violation de la Constitution. Cette condamnation fait suite à son refus de commissionner d’office des avocats pour assurer la défense d’Olivier Boko et Oswald Homeky lors de leur procès devant la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET).

Une affaire aux multiples rebondissements

Tout commence avec un recours introduit par Yélian Rustico, qui dénonce une entrave au droit à la défense dans cette affaire sensible. Selon sa requête, après la déconstitution collective des avocats des accusés, ni le bâtonnier ni le président de la chambre de jugement de la CRIET n’auraient pris les mesures nécessaires pour garantir la représentation légale des prévenus. Or, la Cour constitutionnelle estime qu’une telle situation constitue une atteinte au droit fondamental à un procès équitable, garanti par l’article 7 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

Cependant, un rebondissement inattendu survient lors de l’audience du 28 janvier. Une femme affirmant porter le nom du requérant déclare n’avoir jamais saisi la Cour, soulevant ainsi des doutes sur l’authenticité de la plainte. Malgré cette confusion, la haute juridiction décide de s’auto-saisir de l’affaire, considérant qu’il s’agit d’un enjeu fondamental de justice qui dépasse le cadre de cette plainte initiale.

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Une défense axée sur le mouvement de grève des avocats

Face aux accusations, le bâtonnier conteste la recevabilité du recours, en mettant en avant l’ambiguïté entourant l’identité du plaignant. Par ailleurs, il rappelle que les accusés avaient déclaré être en mesure de se constituer des avocats, ce qui, selon lui, rendait inutile la commission d’office.

En outre, il insiste sur un élément clé : l’existence d’un mouvement national des avocats en cours depuis plus d’un an, justifiant ainsi l’absence de participation aux sessions criminelles. En effet, ce boycott général, qui dépasse le seul cadre du procès Boko-Homeky, a considérablement ralenti le fonctionnement du système judiciaire béninois, comme le souligne le rapport du conseiller rapporteur de la Cour.

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La Cour tranche en faveur des droits fondamentaux

Dans sa décision finale, la Cour constitutionnelle estime que l’inaction du bâtonnier constitue bien une violation du droit à un procès équitable. Elle rappelle que, dans une telle situation, le président de la CRIET aurait pu désigner lui-même des avocats d’office, afin d’éviter tout blocage du procès.

Par ailleurs, la haute juridiction insiste sur un point fondamental : même si les avocats commis d’office refusaient d’exercer leur mission, le procès pourrait tout de même se poursuivre sans leur présence. À travers cette position, la Cour réaffirme que le droit à la justice doit primer sur toute considération corporatiste ou stratégique.

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