Depuis mardi, l’actualité politique béninoise est agitée par l’arrestation sur le territoire togolais d’un célèbre activiste et chroniqueur opposé au régime du Président Patrice Talon. Frère Hounvi, comme il se fait appeler, est désormais entre les mains de la justice béninoise. Une arrestation qui suscite moult réactions dans la classe politique.
Si plusieurs millions de Béninois sont bien habitués à sa voix, et ceci depuis des années, très peu pouvaient lui associer un nom et un visage. Jusqu’à ce mardi 13 août où son identité ainsi que ses photos ont été largement diffusées sur les réseaux sociaux et dans la presse. Et pour cause !
Une arrestation spectaculaire à Lomé
L’homme qui ne vivait qu’à trois heures de route de Cotonou, à Lomé, en territoire togolais a été arrêté à quelques encablures de son domicile. Arrêté ou plutôt kidnappé, car d’après le récit détaillé de l’opération, présenté par le média en ligne Lepatriotebenin.com, il s’agirait bien d’un « rapt préparé avec minutie ».
« Ce lundi soir aux environs de 22h à Adidogomè, Frère Hounvi était allé acheter de l’huile pour faire la cuisine quand il a été pris et jeté de force dans le véhicule 4 X 4 de plaque bleue et d’immatriculation béninoise. Au retour, le véhicule a dû emprunter un itinéraire bien tortueux afin de brouiller les pistes, surtout la police togolaise qui s’est lancée à leurs trousses après avoir appris l’enlèvement. Le trajet va durer toute la nuit avant que Hounvi ne soit amené hier au Centre national d’investigations numériques (CNIN), ex-OCRC où il est gardé et auditionné depuis hier », rapporte le site d’information.
Désormais gardé à la Brigade économique et financière
L’alerte sur le kidnapping de l’activiste a, dans un premier temps, été donnée par l’homme d’affaires et opposant Martin Rodriguez, expatrié aux États-Unis. Par la suite, l’information a été confirmée par Me Aboubakar Baparapé, membre du collège d’avocats chargés d’assurer la défense de l’activiste. À l’occasion d’une conférence de presse qu’il a donnée ce mercredi, l’avocat a confié que Steve Amoussou alias Frère Hounvi était gardé à la Brigade économique et financière de Cotonou. Les propos de l’homme de droit confirment le caractère rocambolesque de l’enlèvement du chroniqueur. Mieux, il fait observer que son client fut « encagoulé, battu, étouffé et n’aurait eu la vie sauve que grâce à l’interposition de l’un d’entre eux (un des ravisseurs, ndlr) ».
L’opposition mobilisée
À part Martin Rodriguez qui a demandé que la vie de l’activiste soit préservée, d’autres acteurs de l’opposition ont également témoigné leur soutien à l’homme. Le parti de Boni Yayi, Les Démocrates, par exemple s’est indigné contre l’arrestation du chroniqueur. Le responsable à la communication de cette formation politique, Guy Dossou Mitokpè a d’ailleurs indiqué que le collectif des avocats du parti se tient à la disposition de l’activiste.
D’autres personnalités opposées au régime du Président Patrice Talon sont aussi montées au créneau pour désapprouver l’acte. Parmi eux, un autre activiste, Thibaut Ogou, récemment libéré de prison après avoir été arrêté en 2021. Il ne comprend pas qu’on puisse arrêter de cette façon « un journaliste qui a sa carte (de presse, ndlr) et a de surcroît la carte de résidence en tant qu’exilé politique au Togo ». L’homme appelle à une action commune de la jeunesse pour une plus grande efficacité de sa lutte politique.
Qui est Frère Hounvi ?
Journaliste de formation, Steve Amoussou alias Frère Hounvi, a servi en 2015 dans la cellule de communication du candidat à la Présidence du Bénin, Sébastien Ajavon. Quelques années plus tard, il sera contraint de prendre le chemin de l’exil comme son mentor. C’est en exil que Frère Hounvi se fera connaître de ses compatriotes à travers ces chroniques acerbes contre le régime du Président Patrice Talon. Des chroniques qui, parfois, distillent des informations d’une telle précision que beaucoup se posent des questions sur ses sources d’informations, soupçonnant parfois des proches du pouvoir d’être de mèche avec l’activiste. L’homme s’est toujours servi des mots comme d’une véritable arme pour tirer à boulets rouges sur un régime auquel il n’a jamais reconnu le moindre mérite.