Avec un Bac +5, Eric Huannu, ingénieur-conseil en information et communication, abandonne tout et fait de la couture depuis une douzaine d’années. C’est un habilleur pas comme les autres. Portrait.
(De notre correspondant)
A 40 ans, Eric Huannu, autodidacte, s’impose comme un styliste béninois de la nouvelle génération. Avec un Bac +5 en poche, il est l’un des rares couturiers qui sait aligner connaissances livresques et artisanat. Il se dit différent des autres stylistes qui ont fait des études de couture. « Ce qui me différencie des autres est que je connais le comment et le pourquoi d’une coupe de chemise. Ce qui n’est pas évident pour quelqu’un sorti d’un atelier de couture ordinaire », explique-t- il.
Eric est un énarque de base. Titulaire d’un diplôme supérieur en information et communication à l’Université d’Abomey-Calavi. Il a poursuivi ses études à Paris 12 pour être ingénieur conseil en information et communication politique. Ce parchemin en poche, ses géniteurs, aussi intellectuels, voulaient qu’il aille au doctorat. Mais il leur oppose un refus catégorique. « J’ai eu le Bac, un diplôme de l’Ecole nationale d’administration (ENA). Et à cela, j’ai ajouté une maîtrise professionnelle. J’ai estimé que j’ai rempli ma part du contrat qui me liait avec mes parents puisque je suis issu d’une famille autoritaire. Après ces diplômes, j’ai dit à mes géniteurs qui voulaient que j’aille au doctorat que je m’arrête là pour aller faire ce qui me passionne. Depuis mon jeune âge, j’ai toujours eu un faible pour les coupons de tissus. Je m’amusais à me faire des pantalons, de petits sacs et bien d’autres choses avec la vieille machine à coudre de ma mère qui appartenait du moins à ma grand-mère », détaille Eric Huannu.
Le destin d’un homme !
Le père d’Eric est professeur de lettres à l’Université d’Abomey-Calavi. Au départ, il a failli maudire son fils aîné. Mais aujourd’hui, loin de toute résignation, il est content du choix de son fiston qui l’habille d’ailleurs. « J’ai toujours respecté et admiré les artistes parce qu’ils sont toujours grands dans leur domaine. Mon fils a fait ce choix et aujourd’hui je suis très fier de lui », déclare tout heureux Adrien Huannu, l’homme qui voulait faire de son fils un prof d’université.
A la sortie de la dernière collection d’Eric dénommée « Caractère », son public se laisse séduire par des petits trucs remarquables sur les chemises. « J’aime bien ses présentations, car il y ajoute une petite note d’élégance », relève Esther Agboton, une cliente du styliste.
Quant à Denise Diakité, une autre cliente du styliste, ce qu’elle admire dans les chefs d’œuvre de l’habilleur est la manière dont il agence les petites broderies. C’est très simple et joli, fait-elle remarquer.
Cela fait douze ans qu’Eric pratique dans la couture. Il dispose d’un atelier qui est à la pointe de la technologie. Et dans sa boutique, il sait aussi attirer de la clientèle. Son seul souhait est d’habiller « Monsieur tout le monde », particulièrement les Africains.