Les opposants sont en prison, mais leurs cris s’entendent de l’extérieur. Même l’Internet est derrière les barreaux, il est interdit de parler, interdit de penser, interdit de laisser respirer les idées. Radhia Nasaraoui se dresse contre l’iniquité, sa grève de la faim émeut le monde entier, elle n’ébranle pas le Palais de Carthage, enfermé derrière ses miradors. Une mitraillette tous les vingt mètres pour surveiller le port antique : interdit de photographier.
La Tunisie prospère sous la férule de Ben Ali. Pas de mécontents, pas d’islamistes apparemment, pas de terrorisme, et si la plus vieille synagogue du Maghreb brûle, c’est un concours de circonstances… Fatal à quelques touristes !
Il faudrait se taire ? Il faudrait fermer les yeux, ignorer ? Comme si le risque majeur n’était pas, encore et toujours, de faire la politique de l’autruche, et de laisser un état dictatorial s’enfoncer dans ses pires travers sans réagir…
Pourquoi fait-on faire silence aujourd’hui à tous ceux qui veulent aider Zine El Abidine Ben Ali à se reprendre, à remettre la démocratie sur les rails, à abandonner l’absurde politique obsidionale qui l’enferme lui-même dans un camp retranché au coeur de son propre pays ? Comme si le plus grand risque n’était pas de couper à la racine le dynamisme tunisien, dans les tripes mêmes de sa jeunesse, découragée et frustrée ?
La Tunisie aurait tout pour être un nouveau dragon, dynamisme économique et lumière intellectuelle : pourquoi éteindre ce feu en lui coupant l’oxygène ? Pourquoi moucher cette flamme? Parce qu’au fond, Ben Ali s’en moque, comme de tout ce qui ne sert pas son pouvoir absolu. Pauvre pouvoir, qui ne vise qu’à sa propre conservation.