Le nouveau régime centrafricain souhaite exploiter au maximum la filière diamant qui constitue la deuxième source de revenu du pays après le bois. Mais avant de pouvoir accroître la production du précieux minerai, le gouvernement doit assainir le secteur, marqué par la fraude jusqu’au plus haut sommet de l’Etat, si l’on n’en croit le ministre des Mines.
Depuis la chute internationalement reconnue d’utilité publique du chef de l’Etat centrafricain Ange Félix Patassé, les langues se délient sur la gestion économique du pays. Le ministre des Mines, Sylvain Ndoutinguaï, a fustigé lundi le laxisme du régime Patassé, notamment dans le domaine du diamant, deuxième source de revenu du pays. Un secteur sur lequel les nouvelles autorités souhaitent s’appuyer pour relever le pays. » L’objectif premier [du nouveau gouvernement] est d’augmenter la production mais il faut assainir le secteur, a expliqué Sylvain Ndoutingaï à l’AFP. A notre arrivée, nous avons trouvé une situation chaotique avec la complicité des autorités en place : des textes contradictoires, des autorisations personnelles d’exploitation accordées en violation du code minier au niveau de la Présidence de la République… »
Gestion personnelle
La République de Centrafrique (RCA) produit et exporte chaque année entre 450 000 et 550 000 carats de diamants. Le problème est qu’en raison de la fraude, on retrouve au moins le double de cette production venant de Centrafrique sur le marché international, selon » Partnership Africa Canada « , coalition d’organisation non gouvernementales africaines et canadiennes. Une fraude que le ministre des Mines attribue aux pratiques du Président Patassé. » Aucune société n’avait le permis d’exploitation prévu par la loi. Certaines n’avaient même pas de permis de recherche, explique-t-il. Sylvain Ndoutingaï enfonce le clou en affirmant que des autorisations étaient délivrées par l’ex-Président » à un milieu restreint, à des fins personnelles et qu’elles ne rapportaient rien à l’Etat « .
Le 14 avril dernier, le gouvernement a décidé de suspendre l’autorisation d’exploitation de la trentaine de sociétés que compte le secteur, tout en épargnant les artisans. Des autorisations que les grandes entreprises retrouveront après examen, au cas par cas. Une société a eu un sort particulier : Colombes Mines. La concession liée à Ange Félix Patassé a réintégré le domaine de l’Etat. Mais le ministre des Mines se veut rassurant : » l’exploitation des mines reste un domaine privé. L’Etat se contente de réglementer, contrôler et percevoir ses taxes « . Avant de conclure, » il faut également mettre au clair les textes et les faire respecter. Quand le terrain sera déblayé, on pourra faire venir des investisseurs sérieux « .
Adhérer au Processus Kimberley
Le diamant exporté frauduleusement de Centrafrique n’est pas intégralement issu du sous-sol national. Une partie des diamants provient de la République démocratique du Congo et qui ne fait que transiter par la Centrafrique. Ces diamants, dits » de la guerre « , sont soupçonnés d’alimenter le Mouvement de libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba, le chef rebelle que Patassé avoue considérer comme » son fils « .
Pour preuve de sa bonne volonté, le régime centrafricain s’engage à adhérer au Processus Kimberley. Cette opération soutenue par les Nations Unies vise à suivre et certifier la provenance des diamants vendus dans le monde et à parvenir à soumettre à un embargo les » diamants de la guerre « . » Il nous reste un dernier accord à signer. Une mission Kimberley est attendue en RCA du 10 au 16 juin « , termine Sylvain Ndoutingaï.