La démocratie sort par les urnes. Quelques fois. Quand les urnes sont transparentes. Sinon, elle vient de la rue. Comme à Antanarivo, en Kabylie et ailleurs… Les voix qui ne sont pas décomptées dans les urnes se retrouvent dans la rue.Quand l’isoloir devient l’antichambre du pouvoir -où les partisans du pouvoir bourrent les urnes- et que les opposants sont emprisonnés, comme à Lomé et Tunis, la rue gronde. La démocratie prend naissance hors du cadre légal. Quand les lois sont bafouées par ceux-là même qui sont censés les protéger, la légitimité prend le dessus sur la légalité.
La parenthèse démocratique des années 90 semble se fermer en Afrique. Robert Mugabe, ce héros encensé par le monde après la décolonisation de l’ex-Rhodésie, a pris l’uniforme d’un dictateur de pacotille. Après 22 ans de règne, de quel bilan peut-il se targuer pour prétendre encore une fois à la magistrature suprême ? Les héros sont fatigués, les libérateurs d’hier sont devenus les geôliers de leurs peuples. A Tunis et à Lomé, Ben Ali et Eyadema donnent un spectacle ridicule, pitoyable. Présidents à vie. La dignité des Tunisiens et des Togolais bafouée, humiliée. En arrangeant la Constitution à leur convenance, les chefs d’Etat contribuent à avilir, encore et encore, l’image de l’Afrique.
La rue, donc. Que faire quand le pouvoir se bouche les oreilles pour ne pas entendre les revendications de la rue, se drape dans la légalité pour refuser la légitimité ? La force, l’histoire de l’Afrique le démontre, n’est sûrement pas la solution. Malgré ses imperfections, la démocratie reste le meilleur système de gouvernance. Ces hommes qui s’accrochent au pouvoir ont le temps contre eux. Le jour où ils comprendront que l’ère des dictatures est finie, il sera trop tard pour eux…