Avec la récente prestation de serment de John Mahama comme président du Ghana, le pays entre dans une période charnière. Selon Amnesty International, ce mandat représente une opportunité cruciale pour s’attaquer aux défis persistants en matière de droits humains, notamment l’égalité des genres, le droit à la liberté de réunion pacifique et la lutte contre les atteintes à l’environnement.
Historiquement considéré comme un modèle de stabilité démocratique en Afrique de l’Ouest, le Ghana fait néanmoins face à des tensions sociales et politiques croissantes. Depuis les années 1990, le pays a connu une alternance régulière au pouvoir entre les deux principaux partis, mais les inégalités sociales, les violences basées sur le genre et les atteintes aux libertés fondamentales subsistent. La répression de manifestations pacifiques et l’impact désastreux de l’exploitation minière illégale figurent parmi les points noirs de ces dernières années.
C’est dans ce contexte que John Mahama entame son mandat, avec pour mission de répondre aux attentes croissantes d’une population exigeant justice, égalité et protection de ses droits fondamentaux.
Les droits des femmes : une priorité inachevée
Le nouveau président doit accélérer les avancées en matière d’égalité des genres. En 2024, moins de 15 % des membres du parlement étaient des femmes. Si la loi sur la discrimination positive, promulguée en septembre 2024, vise à atteindre 30 % de représentation féminine d’ici 2026 et 50 % d’ici 2030, Amnesty International appelle à des actions concrètes pour garantir la participation des femmes à la vie publique et politique.
Cette dynamique est soutenue par la nomination historique de Naana Jane Opoku-Agyemang en tant que première femme vice-présidente. Cependant, les défis restent immenses, notamment dans le nord du pays, où les accusations de sorcellerie continuent d’affecter des centaines de femmes, souvent âgées.
Amnesty International insiste sur la nécessité d’une législation stricte pour criminaliser ces accusations et attaques rituelles, tout en sensibilisant les communautés à leurs impacts. « Ces pratiques engendrent des souffrances et des discriminations inacceptables », souligne l’organisation.
Liberté de réunion pacifique : un droit bafoué
Malgré son statut de démocratie stable, le Ghana a vu de multiples violations du droit à la liberté de réunion pacifique en 2024. Amnesty International critique notamment l’usage abusif de la loi sur l’ordre public pour interdire ou réprimer des manifestations.
Genevieve Partington, directrice nationale d’Amnesty International Ghana, appelle à une réforme législative pour protéger les rassemblements spontanés. « L’obligation de notification préalable ne doit pas devenir un prétexte pour réprimer la liberté de réunion. Ces pratiques vont à l’encontre des engagements internationaux du Ghana », déclare-t-elle.
Galamsey : un fléau environnemental et social
L’exploitation minière illégale, connue sous le nom de galamsey, reste l’un des plus grands défis environnementaux du Ghana. Ses conséquences sont alarmantes : pollution des rivières, déforestation massive et impacts sur la santé publique. En 2024, la Ghana Water Company Ltd fut contrainte d’interrompre la distribution d’eau potable dans certaines régions. En effet, les rivières étant trop contaminées pour être traitées.
Selon Amnesty International, « le gouvernement doit tenir sa promesse d’interdire l’exploitation minière illégale dans les réserves forestières et garantir le respect des réglementations ». Cet engagement inscrit dans le programme de John Mahama doit être mise en œuvre.
Un mandat sous le signe de la responsabilité
Les attentes envers le président Mahama sont élevées. Amnesty International exhorte son gouvernement à adopter des mesures audacieuses et inclusives pour renforcer les droits humains. Cela inclut :
- La mise en œuvre effective de la loi sur la discrimination positive pour accroître la représentation féminine.
- L’adoption d’une législation criminalisant les accusations de sorcellerie et prévoyant une assistance aux victimes.
- Une réforme de la loi sur l’ordre public pour protéger le droit à manifester pacifiquement.
- Une lutte déterminée contre l’exploitation minière illégale pour garantir le droit à un environnement sain.
« Le moment est venu pour le président et son gouvernement de s’engager clairement à donner la priorité à ces questions urgentes en matière de droits humains et à s’y attaquer », conclut Amnesty International.