L’Afrique est particulièrement démunie face aux risques liés à l’utilisation de substances cancérigènes dans l’industrie et les mines, tel est en substance le message de l’OMS à l’occasion de la Journée mondiale pour la sécurité et la santé au travail.
A l’occasion de la Journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail célébrée samedi 28 avril, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a souligné que des millions de travailleurs risquent d’être atteints de cancers liés à leurs lieux de travail, alors que les risques de cancers professionnels, qui font 200.000 victimes chaque année, sont évitables.
Une tragédie évitable !
« La tragédie des cancers professionnels provoqués par l’amiante, le benzène et d’autres substances cancérogènes réside dans le fait que les recherches scientifiques mettent tant de temps à se traduire en mesures de protection », a déclaré le Dr Maria Neira, Directeur à l’OMS de la santé publique et de l’environnement dans un communiqué publié aujourd’hui à Genève.
« Des expositions connues et évitables sont clairement responsables de centaines de milliers de cas supplémentaires de cancer chaque année. Dans l’intérêt de la protection de notre santé nous devons adopter une approche de prévention primaire, c’est à dire débarrasser les lieux de travail des risques cancérigènes », a-t-elle ajouté.
Les principaux cancers professionnels sont le cancer du poumon, de la vessie et de mésothéliome (un cancer malin qui affecte le revêtement intérieur des poumons) pour avoir inhalé des fibres d’amiante et respiré de la fumée de tabac, ou encore de leucémie pour avoir été exposés à du benzène. Un décès par cancer du poumon sur dix est étroitement lié aux risques encourus sur les lieux de travail.
Environ 125 millions de travailleurs à travers le monde sont exposés à l’amiante sur leur lieu de travail et au moins 90 000 meurent chaque année de maladies liées à l’amiante. Des dizaines de milliers d’autres meurent de leucémie causée par l’exposition au benzène, un solvant organique très utilisé par les ouvriers, notamment dans les industries de la chimie et du diamant.
Les niveaux d’exposition aux cancers professionnels sont les plus élevés parmi les travailleurs dont les lieux de travail ne répondent pas aux normes en matière de protection de la santé et de la sécurité et ne disposent pas des infrastructures techniques permettant de prévenir la pollution de l’air par des substances cancérogènes.
Une flagrante inégalité Nord-Sud
Aujourd’hui ces cancérigènes connus sont contrôlés de manière beaucoup plus stricte sur les lieux de travail dans les pays développés. Cependant, les méthodes de production impliquant l’utilisation de cancérigènes tels que l’amiante chrysotile et les pesticides, ainsi que ceux qui sont utilisés dans la fabrication de pneumatiques et la production de colorants, se déplacent vers des pays où les normes en matière d’hygiène du travail sont moins sévèrement appliquées. c’est en particulier le cas de l’Afrique où des multinationales n’hésitent pas à profiter de législations moins strictes que celles auxquelles elles se soumettent dans les pays les plus développés.
Si l’utilisation incontrôlée de substances cancérigènes se poursuit dans les pays en développement, il faut s’attendre à une augmentation sensible des cancers professionnels au cours des prochaines décennies.
Comme si une vie humaine n’avait pas partout le même prix…
Malgré leur connaissance des risques sanitaires réels, le cynisme des groupes qui exploitent les ressources des pays africains les empêche de prendre d’eux-mêmes les précautions parfois coûteuses qu’il serait de leur responsabilité d’adopter ! Comme si une vie humaine ne valait pas partout le même prix…
Il est donc indispensable que les gouvernements des Pays du Sud prennent des mesures coercitives pour protéger leurs citoyens contre les conséquences tragiques de l’exposition, dans leur lieu de travail, à des substances hautement cancérigènes. Tel était le sens de l’alerte exprimée par l’OMS en cette journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail.