Au Cameroun, le magistrat militaire chargé de l’enquête sur l’assassinat du journaliste Martinez Zogo a été dessaisi. Cette décision, qui était attendue, intervient après la controverse suscitée par la décision du juge Sikati de demander la libération des deux principaux accusés avant de se dédire quelques heures plus tard.
Le 1er décembre, la justice militaire camerounaise a pondu une ordonnance plutôt surprenante. Celle-ci relevait que chaque point d’accusation porté par le chef présumé du commando assassin, Justin Danwe, contre son patron, Maxime Eko Eko, s’était révélé non fondé. L’ordonnance du juge faisait savoir que Jean-Pierre Amougou Belinga avait été disculpé par le témoignage de Justin Danwe qui le disculpe.
Amougou Belinga Jean Pierre disculpé
Evoquant l’interrogatoire de Danwe Justin, le juge indique ce dernier a « disculpé Amougou Belinga Jean Pierre et déclaré que cet inculpé n’était en rien impliqué dans l’arrestation, la séquestration et la torture de Martinez Zogo ». « Même la bande visuelle versée au dossier au cours de l’enquête préliminaire et supposée l’incriminer comporte des incongruités qui en altèrent la véracité. Et partant, la recevabilité », ajoute le législateur.
« Attendu que de tout ce que précède, et rendu à ce stade de l’information judiciaire, la détention de Léopold Maxime Eko Eko et de Jean Pierre Amougou Belinga n’est plus nécessaire pour la manifestation de la vérité », lit-on dans le document. Et, ce jour, il a été donné « d’office main levée des mandats de détention provisoire décernés à l’encontre des sieurs Eko Eko Léopold Maxime et Amougou Belinga Jean Pierre ».
Mise en liberté de Eko Eko et de Amougou
Et pour boucler, la justice militaire a tout simplement ordonné « leur mise en liberté, s’ils ne sont détenus pour autre cause ». Décision est donc prise de remettre en liberté deux des principaux accusés inculpés dans l’assassinat, en janvier dernier, du directeur de la radio Amplitude FM. Seulement, le patron du groupe de presse L’Anecdote et celui des renseignements camerounais, Maxime Eko Eko, sont restés en détention.
« Une décision été rendue par M. le juge d’instruction qui prononça la main levée de la détention provisoire de notre client et ordonne sa mise en liberté. Cette décision a été notifiée physiquement à mes collègues de l’équipe de défense. Et cela a été fait en plus en présence d’au moins cinq personnes. La remise de cette décision a été suivie d’une décharge », s’est indigné Me Seri Simplice Zokou, un des avocats de Maxime Eko Eko.
Un démenti à l’information diffusée vendredi
« Nous sommes surpris. Nous attendons que cela nous soit notifié nous-mêmes pour nous assurer que ce que nous entendons émane bien de M. le juge. Jusqu’à présent, nous refusons d’y croire. Ce serait la première fois dans ma carrière de voir une telle situation. Et je dis que nous espérons que cela ne se peut pour l’honneur de la justice en général et pour l’honneur de la justice camerounaise », avait poursuivi la robe noire.
Le samedi 2 décembre, le média Camerounweb révélait que le juge, lieutenant-colonel Florent Aimé Sikati II Kamwo, avait apporté un démenti à l’information diffusée vendredi. Il dégage toute sa responsabilité quant à la signature d’une quelconque ordonnance autorisant la remise en liberté de Jean-Pierre Amougou Belinga et de Maxime Eko Eko. Les accusés ne sauraient être libérés sans qu’une enquête approfondie soit menée et ait livré ses résultats, avait insisté le magistrat.
Rendre justice à la famille de Martinez Zogo
Sauf que ce mardi, un nouveau juge d’instruction a été nommé, en la personne du lieutenant-colonel Ndzie Pierrot Narcisse. Ce dernier devra reprendre l’enquête, depuis le début. Il devra notamment déterminer si les deux principaux accusés, Jean-Pierre Amougou Belinga et Maxime Eko Eko, sont bien responsables de la mort du journaliste. L’assassinat de Martinez Zogo, animateur radio critique du pouvoir, a suscité une vive émotion au Cameroun.
Les deux principaux accusés, Jean-Pierre Amougou Belinga, patron du groupe de presse Vision 4, et Maxime Eko Eko, son directeur de publication, sont inculpés de meurtre et de complicité de meurtre. Ils nient les faits. Le dessaisissement du juge Sikati est un nouveau rebondissement dans cette affaire qui n’a toujours pas connu de procès. Il reste à voir si le nouveau juge d’instruction parviendra à faire avancer l’enquête et à rendre justice à la famille de Martinez Zogo.