L’Association Sœur Emmanuelle (Asmae) fête ses 25 ans, un quart de siècle au service des enfants et des familles les plus déshéritées. Elle intervient sur trois continents : l’Europe, l’Asie et l’Afrique. A l’occasion de la Journée internationale des droits de l’enfant, le 20 novembre, Afrik.com présente l’action que mène cette organisation à travers un entretien que lui a accordé Trao Nguyen, son président.
En 1980, la religieuse catholique Soeur Emmanuelle créait, en France, l’organisation laïque Asmae. Une association loi 1901 qui agit sur le terrain pour remedier aux problèmes de pauvreté et d’isolement. Dotée de faibles moyens à ses débuts, elle possédait en 2005 un budget de 3,3 millions d’euros. Aujourd’hui, l’association, reconnue d’utilité publique, compte une trentaine de professionnels volontaires et plus de 600 bénévoles. A la tête de cette structure, Trao Nguyen. Afrik.com l’a interviewvé.
Afrik.com : Quels enfants Asmae a-t-elle pour mission d’aider ?
Trao Nguyen : Cette association vient en aide aux enfants défavorisés, par l’éducation et l’hygiène. Elle aide en particulier les enfants des bidonvilles et des zones rurales. Elle est présente en France et dans 7 autres pays : Le Burkina Faso, l’Egypte, l’Inde, le Liban, Madagascar, le Soudan et la France.
Afrik.com : Vous déclarez dans votre présentation, sur le site asmae.fr, que votre association est « innovante ». Pourquoi ?
Trao Nguyen : Nous avons choisi de travailler avec des associations locales. Dans les pays en voie de développement, nous pensons que notre vocation est d’arriver à ce qu’un jour les gens n’aient plus besoin de nous, qu’ils puissent se débrouiller tous seuls. Dans chaque pays, nous avons quelqu’un qui nous représente et qui vient en aide à ceux qui en ont besoin. D’autre part, la majorité des dons que nous recevons proviennent du privé, ce qui, à la différence de nombre d’ONG, nous donne une plus grande liberté dans le choix de nos actions. Car des organismes comme, par exemple, la Banque Mondiale ou la Banque Européenne imposent aux ONG un cadre qui parfois ne permet pas de couvrir tous les besoins des populations.
Afrik.com : Comment appliquez-vous concrètement votre méthode ?
Trao Nguyen : Au Burkina Faso, par exemple, nous avons réalisé une étude très approfondie sur ce qu’il conviendrait de faire dans les zones rurales, car ces dernières sont peu couvertes par les ONG. Nous avons fait appel à un consultant burkinabé qui a étudié quels étaient les besoins au Koulpélogo en matière d’hygiène et d’éducation. Nous avons partagé cette étude innovante avec le ministère de l’Education du Burkina Faso qui a été très intéressé. Maintenant, nous mettons en place des missions, avec l’association locale Idébak, afin d’aider les villages où des problèmes ont été observés. Le ministère est d’accord pour créer des écoles là où nous pouvons mettre des missions d’appui pédagogique, car il y a un manque de personnel formé. Nous souhaitons aider à la formation d’enfants qui deviendront les futurs cadres.
Afrik.com : Pouvez-vous nous citer d’autres exemples d’actions que vous menez en Afrique ?
Trao Nguyen : Au Burkina Faso toujours, nous avons aussi réalisé une étude sur la question du handicap. Puis nous avons contacté une association. Il y a pour nous la nécessité de faire des études préalables. C’est un temps que nous nous donnons pour analyser, réfléchir, sélectionner les régions où nous interviendrons et les associations qui sont les plus efficaces. Nous avons entrepris la même démarche à Madagascar. Dans ce pays, il y a peu de kinésithérapeutes, et c’est un problème. Car il y’a beaucoup de handicapés. Et ces enfants bénéficient de très peu de services, à la différence de ceux de France. Malheureusement, nombre de personnes, avec une formation d’un ou deux jours, soignent des enfants et les mettent en danger.
Afrik.com : Quel bilan faites-vous de votre action après 25 ans d’existence ?
Trao Nguyen : En 25 ans, nous avons aidé plusieurs dizaines de milliers d’enfants. Peu à peu, nos partenariats avec les associations progressent. Nous avons mis en place des programmes qui, à chaque fois, nous ont paru intéressants et capables d’être utilisés ailleurs. Donc nous avons capitalisé cette expérience sous la forme d’un Livre blanc pour développer des solutions qui marchent sans pour cela les calquer partout telles quelles. Nous faisons à chaque fois du sur mesure. Pendant une dizaine d’années, l’association a reposé sur des bénévoles. Puis Sœur Emmanuelle a poussé le personnel à se professionnaliser pour se doter d’une structure permanente avec des salariés. Cette mutation était nécessaire pour accroître le travail fourni. Aujourd’hui l’association compte une trentaine de salariés, dont une vingtaine dans l’établissement de Bobigny, en France, une structure d’accueil pour les jeunes mères en grande précarité et leurs enfants. Ces 14 dernières années, j’ai participé à ce mouvement et, pour moi, le bilan est positif. Mais il reste beaucoup à faire.
Afrik.com : Comment comptez-vous célébrer les 25 ans d’Asmae ?
Trao Nguyen : Nous avons fait une rétrospective de la vie de l’association que nous avons mise en parallèle avec l’action humanitaire internationale, car on ne parle pas assez de ce travail. On va essayer de faire tourner cette expo grâce à notre grand nombre de bénévoles éparpillés partout en France.
Afrik.com : Quels sont vos projets ?
Trao Nguyen : Nous allons continuer de creuser le sillon dans lequel nous sommes. Beaucoup de gens sont dans l’action mais ne prennent pas de recul. Donc nous avons la volonté d’analyser et de re-conceptualiser le travail fait en direction des enfants. Nous éprouvons la nécessité de réaliser une plus grande mise en réseau des associations des pays du sud et de créer un véritable équilibre des échanges. Pour nous, le partenariat est un mot fort. Nous ne nous contentons pas d’envoyer de l’argent et de venir récolter les résultats, nous travaillons vraiment avec les associations.
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