Arobase, héroïne moderne


Lecture 3 min.
Aziz Chouaki
Aziz Chouaki

Dans son dernier livre, « Arobase », Aziz Chouaki explore Paris. Après avoir décrit Alger et les Algérois avec originalité et tendresse dans ses précédents ouvrages, il croque Paname et ses habitants avec des dents aussi aiguisées que sa plume. Son héroïne, Arobase, est entêtante.

Arobase. Ça vous rappelle l’Internet, l’email, le numérique ? Une fois que vous aurez lu le dernier livre d’Aziz Chouaki, qui s’intitule de cette façon, vous oublierez toutes ces références et ne penserez plus qu’à elle : Arobase, l’héroïne de son roman. « Pur produit de Provence, Arobase, fougueuse tignasse paille et tressée rasta. » « Des yeux verts grands, pailletés miel et rimmel. » Et ce prénom étrange ? « Ça vient de l’arabe, mon père est andalou d’origine. Quand je suis née, paraît que je devais y passer, je pesais un kilo cent. Mon père m’a appelée Arobase, de l’arabe, arbâ, une unité de mesure, qui veut dire « quart ». Pour mon père, je pesais un quart de bébé. Et j’ai survécu. »

Aziz Chouaki a l’art et la manière de polir des personnages attachants. On se rappelle du héros si touchant de L’Etoile d’Alger. Avec Arobase, il les livre sur un plateau… de théâtre. Sa belle héroïne est metteur en scène et monte Othello de Shakespeare, à Paris. Mais le drame ne se jouera pas que sur scène. Arobase va vivre l’histoire d’Othello en direct, éprouvant le même sentiment de jalousie extrême. Le tout, sous l’œil et la moustache de ce bon vieux William…

Mondanités théâtrales

Le roman est également traversé par des personnage récurrents comme autant de seconds rôles familiers : une Rom facétieuse, deux costards Hugo Boss, canines au vent… L’écrivain provoque les rencontres et les hasards. Parisien depuis 1991, il a délaissé Alger, sa ville natale, qu’il évoquait dans ses précédents ouvrages, pour Paname. Il décrit la ville française avec la même finesse et la même originalité. « Paris klaxonne, il est dix-sept heures, Saint-Germain bruisse, mémoire sentinelle du vieil or de l’air du temps. Oui, celui-là même dont vraiment s’en tamponnent légions. »

Il distille un peu d’Algérie de-ci, de-là. La chienne d’Arobase s’appelle Cirta, du nom de l’ancienne Constantine, Farid, un de ses ex, est algérien, la radio annonce des assassinats et le kiosque à journaux annonce un « Chaos en Algérie »… Il profite aussi de cette fiction pour mettre en lumière quelques travers parisianistes et éclairer le petit monde du théâtre qu’il connaît bien (il a lui-même écrit et monté plusieurs pièces). Celui des critiques mondains qui se retrouvent chez Lipp et des « arlequines farandoles de figures, tous les fondamentaux du voicisme de haut niveau ».

Lire aussi :

Le grand rire du maître.

Alger à 20 ans.

Les Oranges d’Aziz Chouaki.

Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News